Subject: [ATTAC] INFO 535 - SERVICES PUBLICS From: Grain de sable Date: Wed, 7 Dec 2005 16:37:40 +0100 To: gds@attac.org COURRIEL D'INFORMATION ATTAC (n°535) SERVICES PUBLICS mercredi 7/12/05 Merci de faire circuler et de diffuser largement. Le Courriel est reçu aujourd'hui par 53259 abonnés ______________________________ S'abonner ou se désabonner http://france.attac.org/a3652 Confort de lecture et impression papier: Format RTF http://www.france.attac.org/IMG/zip/attacinfo535.zip Format PDF http://www.france.attac.org/IMG/pdf/attacinfo535.pdf ______________________________ ASSEMBLEE GENERALE D'ATTAC : Les Assises d'Attac auront lieu le samedi 10 et le dimanche 11 décembre, à « ROCHEXPO » - Foire de la Haute-Savoie Mont-Blanc, 210, rue de l'Ingénieur Sansoube, 74800 La Roche-sur-Foron. Vous venez de recevoir avec le Lignes d'Attac n° 48 le matériel électoral. Nous vous demandons d'en prendre connaissance aussi rapidement que possible et avec la plus grande attention. Vous avez à vous prononcer sur l'activité du Conseil d'administration (rapport d'activité et de gestion, rapport financier), sur le montant des cotisations 2006, sur les résolutions proposées par le CA, et sur le texte d'orientations. Afin de participer au vote, vous devez être à jour de votre cotisation 2005. Si ce n'est pas le cas, adressez nous immédiatement votre règlement. Un bulletin est disponible à l'adresse : http://www.france.attac.org/a2282 Bien sûr, si vous êtes présent à l'AG, vous pourrez régler votre cotisation sur place. Au cas où vous auriez égaré le bulletin de vote n°1 sur les résolutions qui se situe à la page 9 de la brochure vous pouvez vous en fournir un autre à l'adresse : http://www.france.attac.org/IMG/pdf/bulletin_vote_n_1.pdf Le bulletin de vote n°2 portant sur les orientations est inséré dans le Lignes d'Attac, vous pouvez également le télécharger sur : http://www.france.attac.org/IMG/pdf/vote_orientation.pdf Vous devez placer les deux bulletins dans une enveloppe close et mettre celle-ci dans l'enveloppe jointe (en remplissant les lignes nom, prénom et n° d'adhérent) et l'adresser à Attac 66-72, rue Marceau 93100 Montreuil-sous-Bois. L'ensemble du dossier de préparation de l'Assemblée générale et des Assises est également disponible sur le site Internet d'Attac : http://www.france.attac.org/a5607 ______________________________ SERVICES PUBLICS Dans ce numéro 1. C'EST A NOUS ! Les partis et mouvements de gauche doivent s'engager à nous restituer notre bien en cas d'alternance politique. EDF, c'est à nous ! par Jean Gadrey, 18 novembre 2005, paru dans Politis du 1er décembre. 2. SERVICES PUBLICS, INDIVIDUALITE ET EVALUATION. UN POINT DE VUE HETERODOXE Le sociologue Émile Durkheim (1858-1917) suggérait que les institutions étatiques n'étaient pas uniquement oppressives (dimension réelle, bien perçue par les auteurs libertaires), mais aussi protectrices, que l'autonomie individuelle avait été garantie par une série de droits et de règles inscrits dans ces institutions. C'est un aspect qui est davantage visible aujourd'hui avec les effets des contre-réformes néolibérales (dérégulation, flexibilité, etc.). Par Philippe Corcuff, Paru dans Itinéraires SUD (le journal de SUD Éducation Rhône) n°44, novembre-décembre 2005, pp.16-17 ______________________________ 1. C'EST A NOUS ! Vu à la télé. Des couples contemplent, émerveillés, des installations de production d'électricité. Ils ont une tendance manifeste à préférer les éoliennes et les barrages, c'est-à-dire les énergies renouvelables (8,1 % de la production d'électricité en France, c'est écrit sur vos factures). On aperçoit furtivement une centrale nucléaire en bord de mer. Ils se félicitent d'avoir bien choisi ce qui va devenir leur bien privé, via l'actionnariat d'EDF. Le message publicitaire est clair : avant, c'était à l'État, donc à personne. Maintenant, « c'est à nous ». L'idéologie de la privatisation des biens publics s'exprime ici ouvertement, non sans habileté. Et pourtant, qu'est-ce que l'introduction en bourse d'EDF, après d'autres, sinon la vente à quelques-uns du patrimoine de tous ? Y compris et surtout de ceux qui n'ont pratiquement pas d'autres patrimoines que ceux que la collectivité met à leur disposition comme biens publics, qu'ils soient marchands (l'énergie, La Poste) ou non marchands (l'école, les services sociaux, la santé publique pour ce qui en reste...). Près de cinq millions d'actionnaires, cela semble très important. C'est environ 10 % de la population adulte, et, comme pour les privatisations précédentes, ce chiffre va être divisé par quatre ou cinq en quelques années, avec une poignée d'investisseurs institutionnels détenant tout le pouvoir. Ce que l'on nous présente comme une ré-appropriation est en fait le début d'une expropriation de masse dans un domaine où la propriété collective avait été choisie, avec de bonnes raisons. Objection, votre honneur ! Avons-nous encore aujourd'hui de "bonnes raisons" de défendre le statut public de cette entreprise ? Oui, plus que jamais, mais ce ne sont pas exactement les mêmes qu'à la Libération. Le principal argument visant à « vendre à l'opinion » cette privatisation (partielle pour l'instant, mais on sait bien qu'ils n'ont pas l'intention de s'arrêter là) est le suivant : EDF aurait besoin de fonds importants pour se développer, la privatisation en serait le moyen. C'est ridicule. Cette entreprise dégage d'énormes bénéfices (cash-flow de 7 à 9 milliards d'euros par an). Si elle est actuellement endettée (19 milliards d'euros, en nette diminution depuis 2002, beaucoup moins que France Télécom qui en est encore à 50 milliards), c'est d'abord parce qu'elle s'est engagée, en prévision de sa privatisation, dans des projets d'acquisitions à l'étranger dont beaucoup sont des fiascos, au lieu d'investir dans les énergies renouvelables, les réseaux de distribution, et la qualité de service, qui s'est dégradée ces dernières années. Il est vrai qu'EDF aura besoin à l'avenir d'investir des sommes considérables, mais d'un montant très incertain, pour faire face, entre 2020 et 2050, au démantèlement des centrales nucléaires en fin de vie et au traitement des déchets, ainsi qu'à d'autres incertitudes fortes sur l'avenir du nucléaire. Mais justement : il est fort probable que le secteur privé se refusera à prendre en charge ces risques qu'EDF a très peu "provisionnés". Il va donc exiger de l'État qu'il assume ces risques, selon une logique classique de privatisation des bénéfices et de socialisation des pertes et des risques majeurs. La Cour des Comptes (dans un rapport de janvier 2005) et l'Autorité des marchés financiers (fin septembre) ont exprimé clairement cette préoccupation. Curieusement, on n'a pas entendu l'argument classique en faveur de la libéralisation des services publics : cela ferait baisser les prix, au grand bénéfice du "consommateur". On comprend pourquoi. Vu les tarifs actuels d'EDF, nettement inférieurs à ceux de ses principaux concurrents actuels et potentiels, il faudrait les augmenter fortement pour faire fonctionner la "concurrence libre et non faussée" dans ce secteur ! On n'en parle donc pas pour l'instant. Mais cela viendra, et c'est ce qui s'est produit presque partout ailleurs (en préservant toutefois les intérêts des gros clients industriels). GDF vient de montrer la voie, avec une hausse brutale de ses tarifs qui n'a pas d'autre raison que les exigences des actionnaires. Que l'on soit pour une sortie du nucléaire ou que l'on pense qu'il sera difficile de s'en passer dans un avenir prévisible, on peut s'accorder sur un point. Remettre entre les mains d'intérêts privés de plus en plus transnationaux les grandes questions que sont la gestion des risques nucléaires, la maîtrise de l'énergie dans un monde où le pétrole sera de plus en plus rare et cher, et la lutte contre le réchauffement climatique, ne peut que réduire les capacités d'intervention des citoyens sur des choix qui engagent lourdement notre avenir. Même si la gestion de cette entreprise a parfois été opaque, sa privatisation nous exproprie. Si un referendum, précédé d'un débat sérieux, était organisé en France sur ce point, une nette majorité se prononcerait contre l'ouverture du capital. Les partis et mouvements de gauche doivent s'engager à nous restituer notre bien en cas d'alternance politique. EDF, c'est à nous ! par Jean Gadrey, 18 novembre 2005, paru dans Politis du 1er décembre. 2. SERVICES PUBLICS, INDIVIDUALITE ET EVALUATION. UN POINT DE VUE HETERODOXE Le sociologue Émile Durkheim (1858-1917) suggérait que les institutions étatiques n'étaient pas uniquement oppressives (dimension réelle, bien perçue par les auteurs libertaires), mais aussi protectrices, que l'autonomie individuelle avait été garantie par une série de droits et de règles inscrits dans ces institutions. C'est un aspect qui est davantage visible aujourd'hui avec les effets des contre-réformes néolibérales (dérégulation, flexibilité, etc.). Dans le sillage durkheimien, Robert Castel s'est intéressé à établir un pont entre critique sociale et critique individualiste du capitalisme. Dans Propriété privée, propriété sociale, propriété de soi, Castel a orienté notre regard sur «les supports sociaux» (garanties étatiques, règles juridiques, statut salarial, protection sociale, etc.) de l'individualité moderne. Pour exister de manière autonome, l'individu moderne aurait eu besoin, historiquement, de l'étayage par de tels «supports» collectifs et publics. Or, les contre-réformes néolibérales qui participent, depuis le début des années 1980, à l'émergence du néocapitalisme globalisé érodent les supports sociaux de l'autonomie individuelle, en déstabilisant l'État social. Et cette dérégulation rend de plus en plus difficile pour de plus en plus d'individus d'agir comme des individus autonomes. En s'attaquant aux garanties sociales de l'individualisation (qui avaient stabilisé pour nombre d'individus des sociétés occidentales une certaine prévisibilité de leur vie, par-delà les aléas de la maladie, du chômage et de la vieillesse), le néolibéralisme fragilise l'individualisme pour les plus démunis et plus largement pour des pans importants du salariat, en instabilisant de manière générale la condition salariale. Castel esquisse ainsi une articulation entre critique individualiste et critique sociale du néolibéralisme. Au niveau des projets politiques, cela nous invite à mettre en avant la rénovation de l'État social au c¦ur des alternatives au néolibéralisme, afin d'inverser