Subject: [ATTAC] INFO 519 - EN 2005 PLUS D'EXCUSES From: Grain de sable Date: Wed, 22 Jun 2005 11:12:54 +0200 To: COURRIEL D'INFORMATION ATTAC (n°519) Mercredi 22/06/04 Merci de faire circuler et de diffuser largement. Le courriel est reçu aujourd'hui par 51405 abonnés ___________________________________________ S'abonner ou se désabonner http://www.france.attac.org/a3652 Confort de lecture et impression papier: Format RTF http://www.france.attac.org/IMG/zip/attacinfo519.zip Format PDF http://www.france.attac.org/IMG/pdf/attacinfo519.pdf ___________________________________________ EN 2005 PLUS D'EXCUSES Mobilisation TROCADERO - 1ER JUILLET 2005 Objectifs : mobilisation militante à tonalité politique, émotionnelle, et festive. En 2000, 191 pays se sont engagés à réduire la pauvreté de moitié. En 2005, toutes les trois secondes un enfant meurt à cause de l'extrême pauvreté. Le 1er juillet au Trocadéro, la société civile se mobilise en masse pour exprimer avec force à nos dirigeants, l'urgence de tenir les promesses faites en 2000. En 2005 plus d'excuses ! Lieu de rassemblement : jardins du Trocadéro, (côté place de Varsovie) Heure de début de rassemblement : 18 heures. Dress code : blanc Les manifestants sont invités à : ¢ se joindre à une courte marche rassemblant symboliquement les deux hémisphères Nord et Sud, ¢ venir réaliser une chaîne humaine symbolisée par de longs bandeaux blancs que la foule lèvera pour exprimer sa solidarité avec les citoyens des pays du sud, ¢ venir donner leur voix contre la pauvreté, en criant la souffrance des pays du Sud à l'incitation de personnalités, ¢ venir donner leur visage à la photo du millénaire, réalisée par un photographe de renommée internationale, ¢ se rassembler autour des 8 Objectifs du Millénaire pour le Développement évoqués par des personnalités (célébrités, personnalités du sud). Le tout dans une atmosphère rythmée au son de percussions, autour de stands représentant les organisations syndicales et associatives participant à la coalition, exprimant chacune selon leurs sensibilités, l'urgence d'agir. Les pavillons du Trocadéro seront drapés dans un grand bandeau blanc, symbole international de l'Action Mondiale Contre la Pauvreté. ___________________________________________ Dans ce numéro 1.- UE, le modèle du vivant ll appartient aux Européens de se reconstruire ensemble, chacun en relation avec les autres. Par Réné Passet, professeur émérite à l'université Paris-I, président d'honneur du Conseil scientifique d'Attac. Article paru dans Libération du 21 juin 2005. http://www.liberation.fr/page.php?Article=305465 2.- Un enseignant d'une université espagnole censuré pour avoir défendu les réseaux P2P Lorsque Gutenberg inventa la presse en 1455, nombreuses furent les universités qui se soulevèrent pour dénoncer "cet outil pervers qui ne manquerait pas de vider les bancs des amphithéatres". Les moines-scribes ont du certes s'adapter, mais il ne viendrait à l'idée de personne de contester cette formidable avancée pour l'humanité. Par JORGE CORTELL http://homepage.mac.com/jorgecortell/blogwavestudio/LH20041209105106/index.html 3.- Au c¦ur de MATRIX : le système philippin des cartes d'identité Cet article est un extrait du rapport «Surveillance permanente : le système national philippin de cartes d'identité et le projet mondial de collecte de données et de surveillance individuelle » ("Under the Watchful Eye: The Philippines National ID System and the Global Project to Compile Dossiers and Keep an Eye on Everyone") qui peut être téléchargé sur le site http://www.focusweb.org/pdf/NatIDarticle-format.pdf Par Herbert Docena, chercheur associé à Focus on the Global South. ___________________________________________ 1.- UE, le modèle du vivant ll appartient aux Européens de se reconstruire ensemble, chacun en relation avec les autres. Le sommet de Bruxelles aujourd'hui, tout comme hier celui de Nice, illustre le niveau de maquignonnage auquel est progressivement tombée l'ambition communautaire des années 1950. L'histoire retiendra sans doute la longue dérive d'un navire dont plus personne ne contrôlait la marche et qui a fini par s'échouer. Il était clair, après Maastricht, que la création d'une zone monétaire unique favoriserait la tentation d'un double dumping social et fiscal. C'est donc l'harmonisation en ces domaines qui devenait prioritaire. Il fallait consolider, on s'est contenté d'élargir sans plus savoir où l'on voulait aller. La grande ouverture de 2004 confirmait la dégradation d'une communauté de peuples en une simple zone de libre-échange régie par les principes de l'économie néolibérale. De son échec résulte une double tâche. D'abord, une mission d'urgence. Déséchouer le rafiot constitutionnel avec ses vingt-cinq équipiers, car on ne saurait abandonner les nouveaux arrivés en qui on avait fait naître l'espoir. L'essentiel du cadre proprement constitutionnel étant déjà acquis, la remise à flot ne devrait pas relever de l'impossible. On pourrait, à l'extrême limite, en revenir à « la partie proprement constitutionnelle » du texte qui, selon Valery Giscard d'Estaing, « se résume aux propositions innovantes contenues dans la première partie et à la qualification juridique donnée à la charte des droits fondamentaux dans la deuxième partie. Un point c'est tout » ; donc extirper du projet cette troisième partie qui le dénaturait idéologiquement et dont le président de la convention lui-même reconnaît aujourd'hui qu' « elle n'a jamais fait l'objet d'aucune discussion de fond à la convention » (1) ni d'ailleurs au Conseil européen de Thessalonique auquel elle n'a pas été présentée. Mais ce sauvetage d'urgence ne nous dispense pas d'une entreprise à plus longue haleine : doter l'Europe de structures durables lui permettant de surmonter les turbulences de l'avenir. Il faut en effet se préparer à affronter les conséquences de l'inévitable remise en ordre d'une croissance américaine qui ne pourra indéfiniment reposer sur la confiscation de l'épargne mondiale, l'émergence de la Chine, l'Inde ou le Brésil, l'épuisement des réserves pétrolières, les dérèglements de la biosphère, une mutation technologique d'une portée sans précédent. Un monde meurt, un autre naît. Au plan fonctionnel, la mutation technologique, en déplaçant les moteurs du développement de l'énergie vers ces biens communs que sont l'information, le savoir, l'investissement intellectuel ? l' « immatériel », bouleverse tous les mécanismes économiques. Au plan organisationnel, l'information est relation. Les réseaux de communication s'étendent autour de noeuds décisionnels. La planète entière devient un vaste système d'interdépendances un écosystème dont aucun élément ne peut être compris hors de sa relation avec tous les autres. Hier, de l'atome à l'univers, le monde apparaissait comme une réalité physique et, de l'individu à la société, les structures humaines s'organisaient à l'image de la mécanique. Aujourd'hui, le modèle du vivant s'impose comme celui dont les modes de régulation et les capacités d'adaptation seront indispensables aux organisations humaines (2). Le regard se déplace de la matérialité des choses vers l'articulation des fonctions. Sans avoir la prétention de formuler un projet, on peut tenter d'en tirer quelques leçons visant simplement à guider l'élaboration d'un cadre constitutionnel. 1. Il n'y a pas de système sans une finalité qui en ordonne le fonctionnement. Dans le cas d'un système biologique, c'est la vie ; dans le cas d'un ensemble politique, ce ne peut être que « le désir de vivre ensemble... une volonté commune... », selon les termes de Renan. Cela implique un compromis social dans lequel les citoyens définissent le projet à l'accomplissement duquel ils entendent associer leurs efforts et dont un parlement élu constitue le support. Ce compromis, situé au niveau des valeurs et des fins, consacre la suprématie du politique sur l'économique. Il varie au fil des circonstances et des majorités. Une Constitution démocratique permet l'exercice de cette diversité à la fois par la liberté d'expression et par l'alternance des politiques dans le temps. 2. Une ouverture contrôlée sur le monde. Une ouverture, car celle-ci apporte au système les énergies, les matières et les exutoires indispensables à son métabolisme. Mais aussi une membrane comme Axel Kahn le dit pour la cellule. La membrane n'est pas une cloison étanche mais un organe actif qui, à la fois, marque l'identité du système, le protège et organise ses échanges avec son milieu environnant (3). Dans cet esprit, le traité de Rome, en 1957, organisait une zone interne de préférence communautaire entourée d'une protection commune en sa périphérie. Le «traité constitutionnel» confondait les échanges extérieurs avec une ouverture à tous vents c'est-à-dire une dilution organisée avec un soin particulier pour les mouvements internationaux de capitaux. 3. Une répartition des pouvoirs entre niveaux d'organisation qui, tels «les membres et l'estomac» chers à Jean de La Fontaine, sont à la fois différents, conflictuels, irréductibles l'un à l'autre et cependant indissociables. Dans l'univers physique, du ressort de l'horloge à la machine tout entière en passant par les rouages et les complexes de rouages, court la même loi de la mécanique; c'est l'univers simple et unidimensionnel dans lequel le tout est la somme de ses parties... et l'intérêt général la somme des intérêts particuliers. Dans la perspective inspirée du vivant, de même que la cellule représente plus que la somme des molécules inanimées qui la composent, le passage de l'individu à la collectivité fait apparaître des sauts qualitatifs : l'intérêt général s'apprécie bien au-delà des marchés et du court terme. Chacun des niveaux assume ses fonctions particulières et possède sa logique propre qui ne saurait se réduire à celle d'un niveau inférieur ni se dissoudre dans celle d'un niveau supérieur. L'efficacité impose de placer la décision là où elle produit l'essentiel de ses effets : il n'y a plus à attendre qu'une demande d'autorisation ait à remonter puis redescendre la pyramide des pouvoirs; confiée à un niveau supérieur elle impliquerait des contraintes et des contrôles inutiles ; confiée à des niveaux inférieurs elle abandonnerait à ces derniers ce qu'ils ne savent pas faire; les sous-systèmes économique et financier notamment ne peuvent prendre en compte ni les besoins fondamentaux des personnes ni les régulations naturelles qui se situent hors de leur domaine d'optimisation. Au niveau communautaire donc, tout et uniquement ce qui le concerne de façon directe : diplomatie, sécurité, régulation des échanges avec le reste du monde, grands travaux collectifs, menaces sur la biosphère, etc. ; dans chacun de ces domaines, un seul représentant engage la collectivité sur des positions définies en commun; cette collectivité doit disposer de ressources propres (notamment fiscales) et de la capacité d'emprunter. Les nations conservent leurs prérogatives dans tous les domaines qu'elles n'ont pas explicitement mis en commun. 4. La régulation de la pluralité se fait dans l'interdépendance. Henri Laborit le soulignait pour le vivant (4). Dans un système social inspiré de cette logique, l'intérêt général qui s'impose à tous découle du compromis élaboré par l'ensemble des citoyens ; la régulation monétaire s'effectue sous l'autorité du politique ; les droits fondamentaux et le respect des régulations naturelles définissent les limites à l'intérieur desquelles se déploie le jeu de l'optimisation économique. Il y a donc un champ légitime au libre exercice des intérêts particuliers dans la mesure où ils s'expriment dans le respect d'intérêts supérieurs qu'ils ne prétendent pas s'approprier. Mais il y a aussi un champ légitime de l'intérêt général qui ne se réduit pas à une somme d'intérêts particuliers. Il s'agit d'une économie et d'une société plurielles. 5. Dans un monde mouvant, ne se maintient que ce qui se transforme. Jean Piaget voyait, dans l'adaptation permanente à de nouveaux milieux, l'un des moteurs essentiels de l'évolution complexifiante du vivant (5). Une Constitution doit évoluer moins rapidement que les modes de régulation qu'elle encadre ; mais elle doit évoluer, sous peine de paralyser le système. Le pluralisme est le meilleur instrument de cette capacité d'adaptation. C'est de ne l'avoir pas compris que les systèmes monolithiques de l'Est se sont effondrés. La libre initiative, nécessaire partout où elle est compatible avec l'intérêt général, libère la créativité individuelle et multiplie les centres de décision; l'obstacle, lorsqu'il se présente, est abordé de mille côtés à la fois, contourné, digéré et dépassé; il devient un facteur de renouvellement et de dynamisation du système. Toute institution doit être révisable. La règle de l'unanimité à vingt-cinq rend impossible toute modification constitutionnelle. Entre cette rigidité absolue et l'excès de malléabilité, la majorité qualifiée constitue sans doute un juste milieu. Peu importe si seulement quelques nations sont prêtes à s'engager dans cette direction : le produit national d'un ensemble franco-allemand représenterait presque la moitié ? celui de la zone euro, l'équivalent du produit des Etats-Unis. L'important est que le système reste ouvert aux candidats qui accepteraient d'adhérer aux disciplines communes. Autour de ce «noyau dur», l'Union des Vingt-Cinq constituerait une zone de relations privilégiées dont l'ouverture à l'adhésion de nations situées hors de l'Europe géographique se trouverait considérablement simplifiée. Il appartient à tous les «européens», partisans du oui ou du non, de dépasser leurs affrontements d'hier. Puissent nos amis, de gauche en particulier, comprendre qu'au-delà des rancoeurs et des grandes ambitions des petits personnages, la seule sortie par le haut consiste à reconstruire ensemble. Dernier ouvrage paru: l'Illusion néolibérale (Flammarion). Notes : (1) Le Monde du 15 juin. (2) René Passet : l'Economique et le Vivant, Payot, 1979, Economica, 1996. (3) Axel Kahn et Albert Jacquard, L'avenir n'est pas écrit, Pocket, 2004. (4) Henri Laborit : la Nouvelle Grille, Laffont,1974. (5) Jean Piaget : le Comportement de l'évolution, «Idées» Gallimard, 1976. Par Réné Passet, professeur émérite à l'université Paris-I, président d'honneur du Conseil scientifique d'Attac. ___________________________________________ 2.- Un enseignant d'une université espagnole censuré pour avoir défendu les réseaux P2P Lorsque Gutenberg inventa la presse en 1455, les universités qui se soulevèrent pour dénoncer « cet outil pervers qui ne manquerait pas de vider les bancs des amphithéatres ». Les moines-scribes ont du certes s'adapter, mais il ne viendrait à l'idée de personne de contester cette formidable avancée pour l'humanité. Aujourd'hui les scribes mécanisés de l'ère industrielle, tenants d'un copyright qui n'en finit plus de repousser ses limites, tentent à leur tour de dénier tout usage légal du P2P. Et si celui-ci était la nouvelle imprimerie de l'ère numérique ? Nous vous présentons ici la traduction [1] du témoignage édifiant d'un enseignant d'université qui fait les frais de cette chasse aux sorcières des temps modernes. Devrions-nous vraiment laisser faire ? À la demande de nombreux media étrangers qui souhaiteraient écrire sur cette affaire, et disposer d'un lien en anglais, voici un résumé de mon calvaire. Voici un compte-rendu de ce qu'il m'est arrivé lorsque j'ai essayé de défendre les usages légaux des réseaux peer-to-peer (P2P) en Espagne. Depuis plus de cinq ans maintenant je donne un cours sur, entre autres, la « propriété intellecuelle » (bien que je n'aime pas ce terme), au sein d'un parcours de Master à l'Université Polytechnique de Valence (UPV). Il y a deux semaines, il était prévu que je donne une conférence (sur invitation du syndicat étudiant ETSIA et d'un groupe d'utilisateurs de Linux, à l'occasion de la « Semaine de la culture ») dans l'un des bâtiments de l'université. J'avais prévu d'analyser, au cours de cette conférence, les usages légaux et les avantages des réseaux P2P, y compris dans le cadre d'¦uvres protégées par le droit d'auteur (usages en accord avec la loi espagnole sur la propriété intellectuelle, l'exception de copie privée, ainsi que de nombreux travaux de recherche, livres et décisions de justice). J'avais même l'intention d'utiliser le réseau afin de « prouver » que ces usages sont légaux, puisque des membres de la société de perception des droits d'auteur SGAE avaient déclaré sans sourciller à la télévision et dans les journaux que « les réseaux P2P sont illégaux » (sic). Dans cette optique j'avais même contacté la SGAE, la police nationale et le procureur général pour les informer de ma conférence. La veille de la conférence, le Doyen de l'université (sous la pression de l'association de l'industrie espagnole du disque « Promusicae », comme je l'ai découvert plus tard, et comme il l'a reconnu lui-même dans le quotidien national El País, et même sous la pression de l'association américaine de l'industrie cinématographie MPAA, comme l'indique un autre journal) a essayé d'empêcher la conférence en nous refusant l'accès au local préalablement retenu. J'ai donc demandé une deuxième salle, qui a été refusée également. Même chose pour la troisième. J'ai finalement donné ma conférence dans la caféteria de l'université, pendant cinq heures, devant 150 personnes. Un peu plus tard le jour-même (le 4 mai, je ne l'oublierai jamais), j'ai reçu un coup de fil du responsable des programmes de Master de mon université, qui m'a annoncé que le Doyen de l'université l'avait appelé et lui avait demandé de « s'assurer que je n'enseignerai plus ici » ; puis un deuxième appel de ce même responsable pour me dire : « C'est ton choix, c'est toi qui en portes la responsabilité ». Le Directeur m'a ensuite appelé et m'a d'abord demandé de retirer de mon site personnel tout lien vers celui de l'université, et de « cacher » le fait que j'enseignais là-bas. Puis, il m'a parlé des pressions et des menaces dont l'université et lui-même avaient fait l'objet (inspections sur les licences logicielles, les violation de droits d'auteur, ou toute chose susceptible de leur causer du tort). De toute évidence, il me fallait démissionner pour sauver son emploi (ainsi que celui de tous les intervenants en Master). J'ai donc démissionné. Mais même après ma démission, quand les média (qui commençaient à s'intéresser à cette affaire, comme vous pouvez le voir dans les liens ci-dessous) ont appelé l'université, le vice-doyen responsable de la communication a eu le culot d'affirmer que je « n'avais jamais été professeur dans cette université », et que je « n'avais fait cours qu'à quelques classes ». Bien sûr, je n'étais pas Professeur d'université (ce que je n'ai jamais prétendu être), mais j'y ai enseigné plusieurs matières pendant plus de cinq ans ! Le plus important n'est pas que j'ai perdu mon travail, bien que les notes que j'ai obtenues dans le questionnaire de satisfaction des étudiants soient les plus élevées de tout le parcours de Master, et que je n'ai jamais enfreint aucune règle, aucun contrat, aucun règlement. Ça ne me gêne pas non plus de ne jamais avoir directement reçu le moindre coup de fil de la part de personnes désapprouvant mes idées ou ma manière de faire. Ce que je regrette le plus, c'est d'avoir été CENSURÉ à l'intérieur de ma propre université (dans un pays membre de l'Union européenne de surcroît !), et cela à cause de pressions et de menaces émanant de sociétés de gestion des droits d'auteur, et d'associations de l'industrie du disque et de l'industrie cinématographique (vous trouverez les preuves de tout cela sur mon site web). Quand donc allons-nous réagir ? Nous ne pouvons pas les laisser imposer leur mauvais modèle économique, dépassé et inefficace, par des menaces, des pressions et la loi du silence. Nous devons briser ce silence. Je suis prêt à parcourir le monde (comme je le fais actuellement en donnant des conférences à travers l'Espagne) pour raconter mon histoire, et ils ne m'obligeront pas au silence. La vérité doit être connue. Mais pour cela j'ai besoin de votre aide. Cette histoire a déjà été couverte par plus de 400 blogs espagnols, radios nationales, magazines et journaux. Mais personne ne semble la connaître hors d'Espagne. Pourriez-vous, s'il vous plaît, m'aider à la faire connaître par-delà ses frontières ? Si vous avez besoin d'informations complémentaires, n'hésitez pas à me solliciter. Bien amicalement, et d'avance, merci beaucoup. Jorge Cortell ___________________________________________ 3.- Au c¦ur de MATRIX : le système philippin des cartes d'identité Le projet Matrix ("multi-state anti-terrorist information exchange" ou échange d'informations anti-terroristes multi-états) est une base de données géante qui contient des millions d'informations personnelles : caractéristiques physiques, ethniques, adresses actuelles et passées, numéros de téléphone, casier judiciaire, informations immobilières, photos des voisins et des collègues de travail, informations relatives au véhicule, relevés bancaires, certificats de mariage et de divorce. La liste d'informations complète est tenue secrète, ce qui fait que ne personne sait précisément - sauf ceux qui y ont accès - ce qu'il y a d'autre dans Matrix. Cette base de données est gérée par une société privée et financée en partie par le Ministère américain de la justice et contrôlée par le Ministère américain de la sécurité intérieure et accessible à des responsables américains. Après le 11 septembre, ses programmateurs ont inventé un "quotient de terrorisme" pour chercher des "terroristes potentiels" parmi les personnes qui y figurent. Cette pratique s'appelle le "data mining", (extraction et gestion des connaissances) l'analyse assistée par ordinateur de grandes quantités d'informations personnelles afin d'identifier des schémas de conduites censées indiquer une activité "terroriste". Cette analyse est ensuite utilisée pour établir des "profils" ou attribuer des niveaux de risque aux individus. Par le biais des calculs de cet ordinateur géant, 120 000 personnes ont ainsi atteint un résultat indiquant qu'elles possédaient un "taux élevé de terrorisme potentiel". Leurs noms ont été transmis au FBI, aux services secrets ainsi qu'à d'autres services de police. Des arrestations ont eu lieu par dizaines mais jusqu'à présent, leur identité et leur sort restent secrets. Matrix a des allures de roman de science-fiction mais le système est bien réel et son existence n'est ni niée ni classée secret défense. Bien que le gouvernement américain rejette toute théorie du complot, il y a de bonnnes raisons de penser que Matrix constitue un bon modèle de ce que le gouvernement philippin a l'intention de faire avec toutes les données dont il veut s'emparer par le biais de son projet de carte d'identité nationale. Il est important de souligner que ce qui est crucial pour ce système de cartes d'identité n'est pas le morceau de plastique en soi mais la grande quantité d'informations qui accompagne chaque carte. Même la Cour suprême des Philippines, qui a cassé la décision de l'ex-président Fidel Ramos qui voulait appliquer ce système, a reconnu l'objectif du gouvernement en déclarant que ce système pouvait lui conférer le « pouvoir de rassembler un dossier accablant contre des citoyens sans méfiance». Avec ce système, tous les Philippins sont censés recevoir un « numéro national » dès leur naissance, pendant que leurs renseignements d'ordre personnel sont reliés à une base de données centrale. Le gouvernement a d'ailleurs entrepris de regrouper toutes les informations en provenance des différents services dans un seul système. Le secrétaire à la Défense Avelino Cruz a explicité l'idée sous-jacente en déclarant qu'« Avec un numéro pour chacun, il [était] plus facile de vérifier les dossiers à partir d'un ordinateur ». Ce que le gouvernement ne claironne pas, c'est que la base de données n'a pas seulement pour objectif d'héberger les numéros de sécurité sociale, celui des assurés du secteur public et d'autres renseignements. Le projet de loi du Sénateur Panfilo Lacson's mentionne expressément que : « La carte d'identité contiendra des données essentielles pendant que des données plus sensibles et confidentielles seront stockées dans des systèmes informatiques fermés ». Le Secrétaire de l'intérieur Angelo Reyes a déclaré que les cartes devraient contenir d'autres « éléments caractéristiques ». Cruz souhaiterait y inclure le casier judiciaire. Il est important de savoir que les données accessibles au détenteur de chaque carte ne sont pas destinées à être identiques à ce qui sera collecté par le gouvernement et auquel il aura accès. Les données seront uniquement « confidentielles » pour le porteur, non pour ceux qui les stockeront. Qu'est-ce que le gouvernement a l'intention de faire de toutes ces informations « sensibles et confidentielles » ? Des efforts ont été entrepris pour présenter le projet comme un simple plan innocent destiné à faciliter les transactions du gouvernement ou, pour alléger les portefeuilles, comme l'a déclaré le secrétaire de presse Ignacio Bunye. Mais comme l'a ouvertement déclaré la présidente Arroyo, le projet est nécessaire afin de «renforcer notre efficacité contre le terrorisme », ce qui, soit dit en passant, est aussi le but avoué de Matrix. Le système de carte d'identité sera utilisé pour créer une énorme base de données centralisée contenant tous les dossiers sur tous les Philippins, afin de garder l'¦il sur tous ceux qu'il désignera comme « terroristes » dans un premier temps, et de détecter des « terroristes potentiels » parmi la population dans un second temps. Mais qui va décider de ce qu'est un « terroriste » ? Avec la coopération étroite entre les USA et les Philippines dans la « guerre contre le terrorisme », ce ne sera pas seulement la Présidente Gloria Macapagal-Arroyo qui aura la clé de notre Matrix local et qui décidera de la définition du bon citoyen. Il y a des raisons de penser que le système philippin de cartes d'identité fait partie d'un projet ambitieux, conduit par les USA et destiné à établir une infrastructure mondiale d'identification et de surveillance visant à s'assurer que pratiquement chacun sur terre est identifié et que tous nos mouvements, nos communications, nos transactions sont surveillés, enregistrés et stockés dans des bases de données reliées entre elles et accessibles à divers gouvernements. Tout ceci peut là encore paraître relever d'une théorie du complot mais en fait, la technologie actuellement disponible satisfait déjà aux exigences en voie de concrétisation de cette infrastructure mondiale de surveillance. Ce n'est pas seulement aux Philippines qu'on observe une tendance à la création de systèmes nationaux de cartes d'identité et des bases de données qui les accompagnent, mais dans plusieurs autres pays. Un système d'identification mondial de facto a été mis en place avec l'adoption de la norme des passeports biométriques qui accompagne le développement d'un système global destiné à suivre tout mouvement et à surveiller toutes les communications et les transactions. Des bases de données nationales, internationales, privées et publiques sont reliées, mises en réseau et rendues compatibles d'une façon inédite : le « data-mining » prolifère. Et tout ceci se déroule dans un contexte plus large, marqué par l'introduction de « lois anti-terroristes » partout dans le monde, et accompagné par l'harmonisation croissante des services de police des différents pays. Ces lois « anti-terroristes » donnent invariablement un statut légal aux arrestations sans mandat et aux détentions à durée indéterminée, assouplissent les règles sur les écoutes téléphoniques, la surveillance générale et personnelle des transactions, le gel des avoirs etc, le tout sans que les responsables n'aient à prouver l'existence de motifs raisonnables pour agir ainsi. Dans certains cas, ces lois prévoient l'autorisation des fouilles, des arrestations et des procès « secrets » au sens où l'individu n'a pas le droit de signaler à quiconque qu'il a été fouillé, arrêté ou jugé. Tout ceci permettra-t-il d'enrayer le « terrorisme » ? Prospero Nograles, membre du Congrès philippin et partisan de l'introduction des cartes d'identité a récemment admis lors d'un entretien télévisé qu'il « n'y avait pas de garantie ». Lorsqu'on les presse de répondre, les responsables gouvernementaux sont souvent incapables d'expliquer exactement comment un système de cartes d'identité aurait pu empêcher l'attentat de Makati. Le système de cartes d'identité nationale aidera-t-il à attraper des « terroristes » ? Tout dépend de la définition des « terroristes » selon la présidente Gloria Macapagal-Arroyo ou G. Bush : Nelson Mandela fut jadis qualifié de « terroriste » et les Irakiens qui exercent leur droit de résistance à l'occupation de leur pays conformément à ce qui est gravé dans la Convention de Genève sont eux aussi assimilés à des « terroristes ». Comme l'a admis l'ex-directeur des services de sécurité canadiens, les définitions du « terrorisme » peuvent « très facilement recouvrir des comportements qui ne ressemblent pas du tout au terrorisme ». Seront tout particulièrement vulnérables les militants, l'opposition politique et pratiquement quiconque dont l'existence et les actions minent les intérêts de ceux qui ont le pouvoir de décider de la définition du « terroriste ». Les Musulmans seront davantage stigmatisés car la discrimination est intrinsèque au profilage et au « data-mining ». Mais bien qu'ils soient les plus exposés, Musulmans et militants ne sont pas les seuls à être en danger désormais. Avec les lois anti-terroristes qui fondent la présomption de culpabilité de chacun, avec le « data-mining » qui traite tout individu comme un criminel en puissance sauf si son « quotient de terrorisme » le dément, nous sommes tous des « terroristes potentiels » à présent. Pas des « terroristes » comme les autres mais des « terroristes encartés ». Et on va tous avoir des cartes d'identité pour le prouver. Herbert Docena est chercheur associé à Focus on the Global South. --- Le Courriel d'information a été mis au point par l'équipe du Grain de sable. Reproduction autorisée sous couvert de la mention Courriel d'information ATTAC - http://attac.org/ Avertissement. Les documents publiés n engagent pas l'association ATTAC sauf mention contraire. Ils peuvent représenter l opinion de groupes thématiques,de personnes ou d autres organisations. Il s agit avant tout de pouvoir profiter des expertises et des idées disponibles afin de construire, ensemble, cet autre monde possible, de nous réapproprier notre avenir.