Subject: [ATTAC] INFO 517 - PRIVATISATIONS From: Grain de sable Date: Wed, 8 Jun 2005 15:01:38 +0200 To: COURRIEL D'INFORMATION ATTAC (n°517) Mercredi 8/06/04 Merci de faire circuler et de diffuser largement. Le courriel est reçu aujourd'hui par 51319 abonnés ___________________________________________ S'abonner ou se désabonner http://www.france.attac.org/a3652 Confort de lecture et impression papier: Format RTF http://www.france.attac.org/IMG/zip/attacinfo517.zip Format PDF http://www.france.attac.org/IMG/pdf/attacinfo517.pdf ___________________________________________ POUR UNE EUROPE DEMOCRATIQUE ET SOCIALE LE « NON » EST LE CHOIX MAJORITAIRE DU PEUPLE FRANÇAIS, IL DOIT ETRE RESPECTE RENDEZ-VOUS JEUDI 16 JUIN A 18H30 PLACE DE LA REPUBLIQUE A PARIS Plus d'infos prochainement sur www.france.attac.org ___________________________________________ Dans ce numéro 1.- Le secteur privé toujours à la conquête des marchés de l'eau Vendre le droit à l'eau à des institutions privées pour voir ensuite la population le racheter une nouvelle fois est une question qui refait surface lors de chaque Journée mondiale de l'Eau. Anil Netto est un journaliste indépendant basé en Malaisie, qui couvre les questions politiques et sociales. Il est actuellement coordinateur adjoint de Charter 2000-Aliran, réseau promouvant la liberté de la presse en Malaisie. Traduction : Pascale Coumont et Lalith Paul - Coorditrad 2.- Le recours à la méthode Alors que les prix du pétrole et du gaz continuent de battre des records sur le marché mondial, les compagnies pétrolières présentes en Bolivie, ont recours à tous les moyens à leur disposition pour "démontrer" que le projet de loi sur les hydrocarbures, qui est à l'étude au Congrès National, aura pour conséquence la faillite de ce commerce, et fera perdre à la Bolivie la possibilité d'exploiter les hydrocarbures. Le cri d'alarme de ces compagnies n'est toutefois rien d'autre que la plainte de celui qui, sachant qu'il aura sa part, voudrait être l'unique bénéficiaire. Antonio Peredo Leigue -- La Fogata - Avril 2005 Traduction : Pierre Hily-Blant et Patrick Niquin, Coorditrad 3.- Chiapas : la guerre invisible Le rapport du Centre des droits de l'homme Fray Bartolomé de las Casas, qui démontre la responsabilité de l'armée (fédérale mexicaine, ndlr) dans la création de groupes paramilitaires sur le territoire du Chiapas et accuse de génocide l'ex-président Ernesto Zedillo (1994-2000, ndlr), repose, également, la persistance du conflit dans le cadre d'une guerre contre-insurrectionnelle contenue dans le Plan de campagne Chiapas 94 du Secrétariat de la Défense nationale, qui adopte la forme irrégulière d'une guerre de basse intensité, comme stratégie prolongée d'usure contre "un ennemi interne", identifié comme l'Armée zapatiste de libération nationale (EZLN). Source : La Jornada (http://www.jornada.unam.mx), México, 14 février 2005. Traduction : Diane Quitelier, pour RISAL - http://risal.collectifs.net 1.- Le secteur privé toujours à la conquête des marchés de l'eau PENANG - Vendre le droit à l'eau à des institutions privées pour voir ensuite la population le racheter une nouvelle fois est une question qui refait surface lors de chaque Journée mondiale de l'Eau, laquelle a eu lieu ce mardi. Stimulés par les institutions financières internationales et les intérêts de sociétés, les gouvernements régionaux poursuivent leurs projets en faveur d'une participation privée accrue dans les services de l'eau. Pourtant, les procédés de privatisation du secteur de l'eau ne parviennent nulle part en Asie à fournir une eau potable propre et saine aux communautés, et ce en dépit de l'obligation pour les consommateurs de payer pour avoir accès à un droit humanitaire fondamental. « J'ai beau chercher un système privatisé de gestion du service de l'eau qui fonctionneS( je n'en trouve pas », à déclaré au cours d'une interview téléphonique avec Inter Press Service, Mary Ann Manahan, chercheuse à Manille auprès de « Focus on the Global South ». Par contre, les performances réelles de certains importants services de l'eau gérés par le secteur public en Asie ont anéanti l'argument selon lequel la participation du secteur privé constitue le seul moyen d'en améliorer l'efficacité. Des villes telles que Osaka, Phnom Penh et Penang, où l'eau est gérée par les services publics, sont plus performantes que Jakarta et Manille, deux villes où les privatisations règnent dans différents secteurs clés. Osaka, par exemple, a un niveau de non-rendement de réseau de 7%. Il s'agit d'un indicateur du niveau des pertes d'eau et de revenu en raison des fuites et des factures impayées. Un non-rendement de réseau de 7% atteste d'une performance exceptionnelle. Phnom Penh enregistre un non-rendement de 26% et Penang un louable 19%. En comparaison, Jakarta présente un non-rendement de 51%, et, Manille, 62%. Or, les services privatisés de l'eau les plus importants à Jakarta et Manille sont respectivement gérés par la société britannique Thames Water Plc et la française Suez-Lyonnaise. L'Internationale des Services Publics (ISP), installée en Grande-Bretagne, analyse la privatisation et la restructuration des services publics à travers le monde ; elle a révélé dans une récente étude que Colombo, capitale du Sri Lanka, où le secteur de l'eau est sous gestion publique, possède un niveau de fuite d'eau de 23% seulement contre 35% pour la ville de Londres, dont la gestion du réseau est assurée par Thames Water Plc. L'étude a montré que le taux d'échec des concessions privées et des contrats à long terme de construction-exploitation-cession est extrêmement élevé et risque encore d'augmenter si Suez et Thames abandonnent leurs contrats à Manille et Jakarta. Pourtant, les institutions financières telles la Banque mondiale et la Banque asiatique de Développement, associées à des groupes de pressions comme le Partenariat mondial de l'Eau et le Conseil mondial de l'Eau, encouragent vigoureusement les procédés de privatisation. Manahan a souligné que la Banque mondiale a augmenté ses prêts pour les projets dans le secteur de l'eau ; ils sont passés de 546 millions USD en 2002 à 3 milliards USD en 2005. « Mais rien ne montre clairement que cela a aboutit à fournir une eau potable saine et accessible aux plus défavorisés » a-t-elle déclaré. En outre, dans le cadre de l'Organisation mondiale du Commerce, l'Union européenne suggère d'ouvrir les services de l'eau nationaux aux puissants acteurs étrangers. En effet, depuis le milieu des années 1990, les pays en développement ont été poussés à privatiser leur service de l'eau au travers de partenariat public-privé ou de participation du secteur privé. Mais beaucoup de ces procédés en Asie ont abouti à des résultats désastreux, engendrant une explosion du prix de l'eau, des objectifs non atteints ainsi que des pertes financières et un endettement écrasant. Confrontées à des résultats déplorables, plusieurs multinationales occidentales, au départ avides de projets de privatisation des services de l'eau dans les pays d'Asie, tentent de se dégager rapidement de ces accords de privatisation, sources de déficits et de difficultés. Désormais, ils se limitent, à la place, à des projets fiables ou à des marchés « plus sûrs » comme le Japon et la Corée du Sud. Les détracteurs de la privatisation du service de l'eau se plaignent de la tendance à se focaliser sur les consommateurs urbains alors que la majorité des besoins en eau se situent chez les habitants des zones rurales. Pire, les exploitations privées du secteur de l'eau détournent l'eau des zones rurales pour l'acheminer vers les centres urbains, a déclaré Charles Santiago, économiste de Kuala Lumpur, coordinateur de « Monitoring Sustainability of Globalization ». « Pour ce faire, ils procèdent de deux manières : en canalisant l'eau destinée aux zones rurales vers les zones urbaines et en exploitant l'eau souterraine des zones rurales pour produire de l'eau en bouteille, consommée en grande partie dans les centres urbains » a expliqué Santiago à l'ISP. L'expérience dans les villes d'Asie et d'ailleurs montre que, lorsque les multinationales entrent en scène ou quand le secteur privé intervient, le prix de l'eau explose immanquablement. À Manille, par exemple, le gouvernement vante la privatisation des services de l'eau comme la solution à une crise imminente de ce secteur aux Philippines. « Ils ont promis qu'il n'y aurait aucune hausse du prix de l'eau pendant cinq ans » a souligné Manahan. « Mais en trois ans, ils ont demandé une augmentation des tarifs ». Au lieu des faibles taux promis, Mayniland Water Services, qui détient la concession pour la zone ouest de Manille, a augmenté les tarifs de plus de 400% entre 1997 et 2003. Manila Water Company, concessionnaire pour la zone est, les a majoré de plus de 700% au cours de la même période. Quand les contrats de privatisation de Manille ont échoué, la « solution » finale proposée par le gouvernement philippin a été la « réhabilitation ». Mais Manahan préfère appeler un chat un chat. « C'est un sauvetage » a-t-elle lancé vigoureusement. La société civile fait maintenant entendre sa voix via différents groupes. À Manille, ils ont déposé une plainte contre la « réhabilitation » en cours, arguant qu'elle allait à l'encontre de l'intérêt public et n'aboutirait qu'à accabler les consommateurs et les contribuables. En Thaïlande, des milliers de travailleurs ont manifesté contre la politique gouvernementale de privatisation au début de l'année 2004 - pourtant l'administration du Premier Ministre Thaksin Shinawatra a depuis lors réitéré sa volonté de poursuivre résolument la privatisation. En Malaisie, la jeune Coalition Contre la Privatisation du Secteur de l'eau, composée de 26 groupements civils, s'oppose au plan gouvernemental de nouvelles privatisations d'opérateurs publics du secteur de l'eau dans le pays. Manahan a sa propre solution au dilemme auquel sont confrontés de nombreux gouvernements asiatiques. La chercheuse de « Focus on the Global South » pointe l'exemple de Porto Alegre au Brésil. Les services de l'eau à Porto Alegre étaient privés jusqu'en 1904, puis la ville en a repris la gestion. Dans un processus d'élaboration participative du budget, les habitants de la ville se réunissent tout au long de l'année et décident où seront entrepris les investissements du Département municipal de l'eau et de l'épuration. Entre 1989 et 1996, le nombre de ménages ayant accès à la distribution d'eau est passé de 80% à 98% tandis que le pourcentage de la population desservie par le système municipal d'égouttage est passé de 46% à 85%. « J'appelle à la démocratisation de la prise de décision quant à la manière dont devrait être gérée l'eau de la communauté » a déclaré Manahan. « L'eau constitue un besoin si fondamental qu'elle devrait rester aux mains des pouvoirs publics" (Inter Press Service) Anil Netto est un journaliste indépendant établi en Malaisie ; il couvre les questions politiques et sociales. Ancien comptable, il est actuellement coordinateur adjoint de la Charte 2000-Aliran, un réseau agissant pour la liberté de la presse en Malaisie. http://www.atimes.com/atimes/Asian_Economy/GC26Dk01.html 2.- Le recours à la méthode Alors que les prix du pétrole et du gaz continuent de battre des records sur le marché mondial, les compagnies pétrolières présentes en Bolivie, ont recours à tous les moyens à leur disposition pour "démontrer" que le projet de loi sur les hydrocarbures, qui est à l'étude au Congrès National, aura pour conséquence la faillite de ce commerce, et fera perdre à la Bolivie la possibilité d'exploiter les hydrocarbures. Le cri d'alarme de ces compagnies n'est toutefois rien d'autre que la plainte de celui qui, sachant qu'il aura sa part, voudrait être l'unique bénéficiaire. Dimanche dernier, elles se sont servies des opérateurs de services ;. hier, des petites entreprises ; la semaine dernière, c'était les entrepreneurs en général. Et depuis plusieurs mois, des comités civiques d'une région, dont on dit qu'elle jouirait de règles d'exploitation qui permettent d'exporter tous les bénéfices à l'extérieur, règles qui restent en vigueur tant que la nouvelle loi n'est pas ratifiée. Progressivement, la nouvelle loi, bien qu'elle ne reflète pas la totalité des revendications du peuple, fait émerger un consensus. La nationalisation comme solution extrême Quand débuta la lutte pour la récupération des hydrocarbures, des groupes radicaux proposèrent la nationalisation de cette ressource naturelle. L'histoire de la Bolivie est marquée par deux épisodes de ce type. En 1937, peu après qu'une guerre ait vu s'affronter la Bolivie et son voisin le Paraguay, les concessions, alors propriétés de la puissante société multinationale Standard Oil, furent nationalisées, donnant naissance aux Gisements Pétrolifères de l'Etat Bolivien (YPFB). Trente ans plus tard, en 1969,les hydrocarbures revenaient aux mains d'entreprises étrangères - cette fois-ci Gulf Oil- et il fallut procéder à une seconde nationalisation, incluant la confiscation de leurs biens. Dans chaque cas, le pays a dû payer à ces entreprises, des charges d'indemnisation qui ont traîné en longueur pendant plusieurs années. La dernière privatisation, au cours de l'étape actuelle, se fit dans le cadre du modèle néolibéral, avec la mise en place de nombreuses clauses afin de décourager toute tentative de récupération. Les ministres du président Gonzalo Sanchez de Lozada, au cours de son premier mandat (1992-1997), se vantèrent d'avoir signé des contrats auxquels on ne pourrait changer une virgule. En réalité, il n'y avait pas de quoi être si fier, puisque les contrats avaient été mis au point par les avocats des entreprises exploitantes. Evidemment, ils cherchèrent à couvrir leurs investissements, en les valorisant exagérément et en les plaçant sous la protection de l'arbitrage international. Mais surtout, ils outrepassèrent la Constitution Politique de l'Etat en obtenant la propriété des hydrocarbures et, ce qui est un comble, en déclarant confidentiels lesdits contrats. Bien sûr, en échange du permis d'exploitation, elles reversaient une somme représentant 18% du volume extrait, et calculée sur la base du prix en sortie de forage ; si on estime que les dépenses représentent entre 20 et 25%, le gain était, et demeure, si important qu'il n'y a probablement pas d'autre lieu aussi alléchant pour ce type d'exploitation. En fait, si on procédait à la nationalisation réclamée par ces secteurs, la Bolivie se trouverait confrontée à une demande de plusieurs millions de dollars (de 5 à 7), ce qui, à supposer qu'on nous accorde un crédit d'une telle ampleur afin de faire face à cette nouvelle demande, doublerait la dette externe du pays. Le généreux ICH (Impôt Complémentaire sur les Hydrocarbures) Le gouvernement de Don Carlos Mesa - au sein duquel se sont succédés cinq ministres des hydrocarbures en un an et demi de législature - a d'abord proposé une formule qui maintient à 18% la redevance versée pour le permis d'exploitation, en suivant l'argument selon lequel les contrats stipulent qu'elle est inaliénable, et un Impôt Complémentaire sur les Hydrocarbures (ICH) qui atteindrait très lentement les 32%, à mesure que les volumes d'exploitation augmenteraient : aucune projection n'atteint un tel taux dans les 20 prochaines années. De plus, le même projet proposait que cet ICH soit déductible de l'impôt sur les bénéfices. Bien qu'il soit évident que le gouvernement s'opposait aux attentes de la majorité des acteurs sociaux en assumant cette proposition, on peut supposer qu'il s'agissait d'une tentative de compromis qui permette de trouver un accord avec les compagnies pétrolières. Cependant, lorsque le Congrès National comprit que sa proposition ne rencontrait pas un appui croissant, il entama, une campagne, avec le vif désir de combattre les positions contraires aux siennes, campagne dont le résultat aura été de créer une incertitude générale qui a fait beaucoup de mal au pays. Partager les gains La position qui recueilli un concensus consistait à augmenter la valeur de la redevance à 50%. Le gouvernement s'y opposa fermement, ce qui eut pour effet de faire apparaître l'appui de la majorité de l'opinion à cette propposition. Le long débat qu'elle a suscité atteignit son paroxysme lorsque, il y a deux semaines, la chambre des députés ratifia une formule intermédiaire entre celle du gouvernement et celle des "50%". Cette formule maintient à 18% la redevance d'exploitation et fixe à 32% un impôt calculé "en sortie de forage", non déductible dans le pays, mais déductible à l'étranger. Bien que le MAS (Mouvement vers le Socialisme) ait annoncé qu'il maintenait son opposition et qu'il exigeait l'adoption de la formule "50%", la bataille culmine à son maximum et tout indique qu'on aura effectué alors un rattrapage considérable. Les entreprises restent Pour revenir au premier point, les entreprises pétrolières sont en train de livrer leurs dernières batailles pour conserver leurs gains, mais elles savent bien que, au final, ,elles devront se plier aux nouvelles règles du jeu. A la fin du mois, nous aurons obtenu l'approbation d'une loi qui, sans satisfaire pleinement ni les uns, ni les autres, constituera un bon point de départ pour envisager l'exploitation du gaz dans des conditions bénéficiaires pour le pays. Antonio Peredo Leigue - La Fogata - Avril 2005 Traduction : Pierre Hily-Blant et Patrick Niquin, Coorditrad 3. Chiapas : la guerre invisible Le rapport du Centre des droits de l'homme Fray Bartolomé de las Casas, qui démontre la responsabilité de l'armée [fédérale mexicaine, ndlr] dans la création de groupes paramilitaires sur le territoire du Chiapas et accuse de génocide l'ex-président Ernesto Zedillo (1994-2000, ndlr), repose, également, la persistance du conflit dans le cadre d'une guerre contre-insurrectionnelle contenue dans le Plan de campagne Chiapas 94 du Secrétariat de la Défense nationale, qui adopte la forme irrégulière d'une guerre de basse intensité, comme stratégie prolongée d'usure contre "un ennemi interne", identifié comme l'Armée zapatiste de libération nationale (EZLN). Dans une tentative propagandiste pour minimiser, rendre invisible et/ou nier l'actualité du conflit, le gouvernement de Vicente Fox soutient qu'au Chiapas il ne se passe rien et que tout est résolu. Mais bien que les confrontations soient plus rares, et de moindre gravité, le cercle de harcèlement et d'anéantissement monté par l'armée est encore en vigueur dans la région de los Altos, la forêt et la zone nord de l'Etat (du Chiapas, ndlr). Les forces fédérales agissent comme une armée d'occupation dans tout le territoire indigène, en combinant des opérations régulières et d'autres irrégulières (tâches de renseignement, guerre psychologique, contrôle de population, harcèlement et menaces). Ce qui explique à la fois la présence organisée et l'impunité de bandes paramilitaires, ainsi que la réarticulation des groupes de pouvoir politique et économique traditionnels, qui dans le passé ont servi de forces de choc anti-zapatistes, parmi lesquels "los autenticos coletos" de San Cristóbal, la famille Kanter à Comitán et le groupe [paramilitaire, ndlr] Paz y Justicia dans la zone nord. L'absence de tirs ne se montre pas telle qu'elle est : une trêve armée, à laquelle l'État a été contraint pour des raisons conjoncturelles. Cependant, depuis l'offensive militaire du 9 février 1995, l'équipe de Sécurité nationale chargée de planifier et d'exécuter les politiques pour le Chiapas a appliqué des directives de base de la guerre appelée de basse intensité (GBI). Cette doctrine change la nature de la guerre, la rend irrégulière, la prolonge et la transforme en un conflit politico-idéologique. Le manuel d'opérations psychologiques de la CIA au Nicaragua (Omang, 1985) définit que la guerre psychologique est un type d'opération militaire qui est utilisé de préférence pour contrôler de grandes masses ou des territoires. La dissimulation systématique de la réalité est une des caractéristiques de la guerre psychologique. Toutefois, puisque la GBI se livre de manière non conventionnelle, outre l'utilisation manichéenne de la propagande (ami-ennemi/blanc-noir), elle utilise d'autres méthodes visant à inciter sur les comportements collectifs, les conduites et opinions. Les deux principaux outils complémentaires de la propagande sont l'action civique et le contrôle de populations. L'action civique a comme objectifs d'améliorer l'image des forces armées, de construire un appui populaire à l'effort de guerre et de récolter des renseignements. De manière factieuse, l'"aide humanitaire" est utilisée comme catégorie politiquement neutre et surtout non militaire. Cependant, elle fait partie d'une stratégie globale et contribue à la construction d'un consentement actif. Pour sa part, le contrôle de la population, qui consiste au déplacement de communautés ainsi déracinées de leurs lieux d'origine, a principalement un objectif simple : désarticuler les bases de soutien des insurgés. La GBI cherche à générer un consensus mais, si elle ne l'obtient pas, elle recourt à la terreur. Le dilemme est de gagner la masse ou de la détruire par un schéma de guerre psychologique (guerre sale) orientée en gros, contre tous ceux qui constituent la base sociale d'appui, matériel ou intellectuel, réel ou potentiel, des insurgés. À défaut d'une justification légale ou politique pour confier à l'armée l'attaque contre la société civile, la tâche est confiée à des appareils clandestins connus comme autodéfenses ou paramilitaires, comme le recommande le Plan de campagne Chiapas 94 de la Sedena (Secrétariat de la Défense nationale). Le paramilitarisme n'est pas, comme on le prétend, une "troisième force" qui agit avec une autonomie propre. Il répond à une stratégie basée sur la doctrine contre-insurrectionnelle classique, qui cherche à confondre, à dissimuler et à cacher les responsabilités de l'État dans les massacres, infractions/crimes/assassinats (delitos de lesa humanid! ad !) et meurtres sélectifs exécutés par des bandes armées patronnées et contrôlées par l'armée. Reconnaître au paramilitarisme le caractère d' "acteur politique indépendant" implique de retirer sa responsabilité à l'Etat, et de laisser libre de responsabilité l'État et dans l'impunité ceux qui le financent, le soutiennent, le conseillent, le justifient. C'est aussi laisser la porte ouverte pour qu'ils continuent à utiliser la terreur. La preuve que l'absence de tirs n'est pas une indication que le conflit armé a été dépassé, est l'existence de 114 positions permanentes de l'armée dans la zone de conflit. Une trêve armée persiste parce que les deux adversaires sont forts, chacun à sa manière : l'armée fédérale a augmenté son pouvoir territorial et offensif, mais l'EZLN a démontré de l'habilité pour continuer à être forte à la défensive. Dans le cadre de cette guerre irrégulière d'usure, le pouvoir des armes fédérales n'a pas pu mettre en échec, jusqu'à présent, le pouvoir des corps zapatistes avec leurs "juntas de buen gobierno" et leurs "caracoles" (organes d'autogouvernement des communautés zapatistes, ndlr). Mais il ne faut pas perdre de vue le moment des élections. Il existe des forces pouvant souhaiter relancer une nouvelle escalade de violence au Mexique afin de recréer une atmosphère propice pour le "vote de la peur", dans lequel cas le Chiapas et l'EZLN apparaissent comme l'un des scénarios et obje! ctifs possibles pour monter une grande provocation. Source : La Jornada (http://www.jornada.unam.mx), México, 14 février 2005. Traduction : Diane Quitelier, pour RISAL http://risal.collectifs.net --- Le Courriel d'information a été mis au point par l'équipe du Grain de sable. Reproduction autorisée sous couvert de la mention Courriel d'information ATTAC - http://attac.org/ Avertissement. Les documents publiés n engagent pas l'association ATTAC sauf mention contraire. Ils peuvent représenter l opinion de groupes thématiques,de personnes ou d autres organisations. Il s agit avant tout de pouvoir profiter des expertises et des idées disponibles afin de construire, ensemble, cet autre monde possible, de nous réapproprier notre avenir.