Subject: [ATTAC] INFO 509 : PERVERSION COMPTABLE From: "Grain de Sable" Date: Wed, 13 Apr 2005 17:58:45 +0200 To: COURRIEL D'INFORMATION ATTAC (n°509) PERVERSION COMPTABLE Mercredi 13/04/05 Merci de faire circuler et de diffuser largement. Le courriel est reçu aujourd'hui par 50 425 abonnés ___________________________________________ S'abonner ou se désabonner http://www.france.attac.org/a3652 Confort de lecture et impression papier: Format RTF http://www.france.attac.org/IMG/zip/attacinfo509.zip Format PDF http://www.france.attac.org/IMG/pdf/attacinfo509.pdf ___________________________________________ Dans ce numéro 1.- L'IASB OU LA PERVERSION COMPTABLE. par Pierre Bachman Les normes comptables ne sont pas neutres. L'organisme ou la puissance qui les détermine est un acteur important de la régulation de l'économie. En 2000 l'union européenne a pris une décision majeure : les Européens vont renoncer progressivement à leurs normes comptables nationales au profit d'un ensemble de règles élaborées par une entité privée dite «indépendante» dont les structures se partagent entre les États-Unis et la Grande-Bretagne : l' International Accounting Standards Board (IASB). Toutes les entreprises cotées en bourse devront appliquer les normes de l'IASB, dite IAS ou maintenant IFSR, au 1er janvier 2005. ------------- SUPPLEMENT : AU NOM DE L'EUROPE JE VOTE NON 2.- LES NEERLANDAIS PERDENT CONFIANCE DANS L'EUROPE Par Anthony Brownie, texte paru dans « Times » Maastricht, 11 mars 2005 3 - SANS PAILLETTES MAIS EN FANFARE, AVEC ATTAC, FAITES LE NON DONT L'EUROPE ET LE MONDE ONT BESOIN Journée du 30 avril à Paris Expo, Paris, Porte de Versailles; Hall n°8 de 14 h à 20 h ___________________________________________ 1.- L'IASB OU LA PERVERSION COMPTABLE. par Pierre Bachman Les normes comptables ne sont pas neutres. L'organisme ou la puissance qui les détermine est un acteur important de la régulation de l'économie. En 2000 l'union européenne a pris une décision majeure : les Européens vont renoncer progressivement à leurs normes comptables nationales au profit d'un ensemble de règles élaborées par une entité privée dite « indépendante[1] » dont les structures se partagent entre les États-Unis et la Grande-Bretagne : l'International Accounting Standards Board (IASB). Toutes les entreprises cotées en bourse devront appliquer les normes de l'IASB, dite IAS ou maintenant IFSR[2], au 1er janvier 2005. Cela va profondément modifier la donne économique internationale dans la mesure où auparavant il y avait autant de plan comptable que de pays. Désormais il n'y aura plus que deux systèmes référents ; l'américain et celui de l'IAS. Toutefois, il faut savoir que ce dernier est essentiellement aligné sur les normes du système américain. L'objectif visé est boursier, destiné à assurer la transparence et la comparabilité des comptes des entreprises pour une meilleure efficacité des marchés financiers mondiaux. En fait il s'agit de permettre aux investisseurs institutionnels et éventuellement, dans le cadre des règles destinées à protéger les actionnaires minoritaires, de permettre aussi à ceux-ci, d'évaluer par des règles communes, la profitabilité de leurs investissements et de sécuriser autant que faire se peut l'accumulation des capitaux. Il s'agit donc d'une aggravation de l'ensemble des règles de gestion de l'économie mondiale tournant le dos à la satisfaction des besoins, au codéveloppement durable, aux solidarités internationales. Norme IAS et reversement de perspective. Aujourd'hui, la comptabilité française est présentée sous une forme précise établie par le plan comptable tel qu'il a été revu en 1982. Ce plan comptable rend compte de l'activité des entreprises, bien sûr sous un aspect marchand et monétaire, en vue d'évaluer leur contribution à la création collective de richesse nationale et de permettre une fiscalité assise sur cette richesse crée. C'est ainsi qu'il est possible de calculer ce que les comptables et les statisticiens français appellent la valeur ajoutée. La somme des valeurs ajoutées créées par toutes les entreprises s'appelle la PIB. Toute la comptabilité nationale, la comptabilité des affaires sont basées sur ce plan comptable. Il en est de même pour le contrôle de gestion des entreprises exercé par exemple par les comités d'entreprises. Toute une culture d'intervention dans la gestion s'est constituée à partir de cette vision comptable de l'activité. Une telle approche comptable, même si elle peut être critiquée sur un certain nombre d'aspect, permet le débat sur la production de richesse, sur sa répartition, sur l'efficacité économique et sociale. Elle permet par exemple d'argumenter sur l'idée de sécurité sociale professionnelle ou de sécurité d'emploi et de formation, ou enfin de statut du travail et des travailleurs car elle sous tend une certaine idée de solidarité économique et sociale. Le plan comptable rend compte de l'activité en la décomposant en charges par nature comme les consommations intermédiaires, les amortissements, les dépenses de personnel, les impôts, les diverses provisions etc. C'est cette décomposition qui permet de calculer la richesse crée : la valeur ajoutée. Tout le travail politique, associatif ou syndical sur les "nouveaux critères de gestion" et l'intervention sur les stratégies est fondé sur la culture qui découle de cette représentation de l'activité. Le patronat lui-même avait l'habitude de dire que l'objectif de l'entreprise était de produire de la richesse (il s'agissait alors d'opposer production de richesse à créations d'emplois). Les nouvelles normes de l'IAS vont dans un premier temps marginaliser, puis à terme très probablement supprimer toute approche possible en ce sens. Elles visent uniquement à permettre la planification la plus sûre possible des prévisions de profits pour les investisseurs financiers. Ainsi, aujourd'hui, pour les grandes entreprises internationales, il ne s'agit plus de richesse mais de produire de la valeur pour les actionnaires. Il faut donc permettre à la fois des bénéfices mais surtout la création de plus-value par une cotation élevée des actions à la Bourse. Les normes IAS présentent trois caractères mortifères : la décomposition à terme exclusive, de l'activité en charges par fonction, la plus grande des libertés laissée pour la prise en compte des amortissements et valeur des actifs (goodwill), l'affichage des profits financiers potentiels (fair value). Il s'agit, pour l'économie européenne et plus particulièrement pour l'économie française, d'un véritable renversement de perspective. La décomposition de l'activité en charges par fonction signifie que seront comptabilisées les fonctions de production, de commercialisation, de recherche, de marketing, de vente, administratives etc. il n'est pas inintéressant de disposer d'une telle représentation de l'activité toutefois, dans la norme IAS, elle sera très probablement exclusive de toute autre représentation au lieu de considérer la complémentarité ou la subsidiarité avec la décomposition par nature. La prise en compte des amortissements et actifs symbolise la variabilité constante des normes de l'IAS et son alignement sur les normes américaines. Par exemple ; en 1993 la prescription pour les amortissements était de 5 ans au maximum, sous l'influence de la comptabilité dite statique allemande. En 1998, sur la base d'une démonstration dite scientifique, la durée d'amortissement est passée à vingt ans maximum, représentant un compromis entre les normes allemandes et les normes dites dynamiques américaines. En 2002, une révision au nom de la convergence avec la position américaine, a établi qu'il n'y aurait pas d'amortissement systématique. C'est une remise en cause sans démonstration par alignement sur la position US telle qu'elle vient d'être édictée récemment. On passe de 40 ans possibles (ancienne norme US) pour la prise en compte des amortissements à l'absence d'amortissement systématique (nouvelle norme US). Ceci autorise une réelle manipulation dans la présentation et dans le calcul des résultats d'une entreprise permettant les comptes les plus flatteurs et les exonérations fiscales les plus importantes possibles. De leur côté, les actifs pourront être surévalués grâce au goodwill, élément d'actif incorporel qui, correspond aux bonnes relations de l'entreprise avec ses clients, à la qualité de ses « ressources humaines », à un emplacement favorable, à sa réputation et à de nombreux autres facteurs qui permettent à l'entreprise de réaliser des bénéfices réels ou supposés supérieurs à la normale. Cet élément n'est généralement pas comptabilisé[3] sauf en cas d'acquisition. Cet écart d'acquisition ou goodwill, différence entre le prix d'achat et la valeur comptable de la firme acquise, n'est pas une simple écriture. Comme l'illustrent les exemples de Vivendi ou de France Télécom, son amortissement (en cas de crack qui transforme le goodwill en badwill) a un impact très négatif sur le résultat net de l'acquéreur. Une étude sur 46 grandes sociétés françaises montre que plus la survaleur est élevée, moins l 'acquisition a de chances d'être un investissement « créateur de valeur[4] » et moins le cours de Bourse sera favorable, après avons cru le contraire en pendant toute la période dite de « nouvelle économie » ! Autre exemple, l'expertise commanditée par le comité d'entreprise du Crédit Lyonnais[5] montre que « les conditions onéreuses de l'acquisition (du Crédit Lyonnais par le Crédit Agricole NDLR) vont peser sur les résultats futurs du groupe ». Le cabinet auteur de l'étude évalue à 8,9 milliards d'Euros la survaleur payée (goodwill) entre la valeur d'acquisition du crédit lyonnais et sa valeur comptable actuelle. Avec une hypothèse d'amortissement de cette sur-valeur sur vingt ans (durée de vie supposée, cf. ci dessus), le cabinet prévoit une diminution du résultat du groupe dont l'importance va peser lourdement sur sa rentabilité ainsi que sur le rendement de ses fonds propres. En d'autres termes ; lors de l'achat du Crédit Lyonnais par le Crédit Agricole, il a été fait une hypothèse de profit futur[6] extrêmement élevée de façon à rassurer les marchés financiers sur la valeur à court terme de l'action et simultanément porteuse de stratégies tout entières tournées vers l'obtention de cet objectif. On imagine alors à quel point ce genre de comportement, issu d'une théorisation de l'imprudence financière et boursière, va avoir des conséquences ravageuses sur le plan social tout en ne donnant aucune sécurité sur l'avenir de l'entreprise. C'est parce que de telles pratiques se sont fortement développées ces dernières années que de très grandes entreprises, surestimant largement leur profitabilité future en vue de doper la valeur immédiate de leurs actions, sont aujourd'hui en difficulté ou même en faillite alors que jusqu'à présent on les considérait comme trop importantes pour subir des aléas économiques mortels (« too big to fall »). On peut aussi supposer que les fusions-acquisitions ont aussi le même objectif et que cette pratique comptable va (ou à pu) les favoriser. C'est pour cela que l'on parle dans la presse économique du « marché des fusions-acquisitions » qui est actuellement peu actif à cause d'une bourse en croissance modérée au grand dam des « investisseurs institutionnels[7] ». Il faut alors bien voir que les normes IAS pourront être fluctuantes au gré des rapports de forces, des conjonctures économiques, des visées stratégiques des firmes, des groupes et des cabinets d'audits les plus importants. Plus problématique encore est la théorie du fair-value. Le fair-value ou « juste valeur » correspond à la somme des plus-values ultérieures attendues et actualisées sur une période de vie de l'entreprise. Il s'agit là d'une vision particulièrement spéculative sur la capacité de l'entreprise à produire et à planifier du profit financier (bénéfices et surtout plus values d'actions) sur une durée incertaine. Il n'y a donc de ce point de vue rien d'objectif mais un rapport de force ou un rapport totalement subjectif à la confiance faite à des données comptables avancées par l'entreprise ou par le groupe. La nouvelle normalisation comptable est en particulier destinée à construire ce rapport de confiance qui repose pour une bonne part sur des mythes, sur des croyances et des bases irrationnelles. Pour autant, il fonde une pseudo science qui fait un large appel à la modélisation et au calcul mathématique. De ce point de vue, il faut lire la critique acerbe d'un économiste comme Renato Di Ruzza dans son ouvrage « De l'économie politique à l'ergologie » : « Les économistes n'ont rien à dire sur la marche du monde, et les théories qu'ils utilisent sont bonnes à jeter aux orties : incohérentes, incapables de définir clairement les variables qui leur servent de fondement, ces théories ne sont là que pour alimenter une mythologie scientiste et pseudo savante qui n'a d'autre objet que de fournir des justifications à certains comportements et à certaines pratiques ». C'est ainsi que Jacques Richard, professeur de comptabilité à l'université de Paris-Dauphine, conclue un article sur les nouvelles normes comptables dans la revue Analyse et Documents Economiques de la CGT (n° 96 de juin 2004) par les termes suivants : « nous pouvons donc, en conclusion, émettre trois hypothèses fondamentales : la première est que le capitalisme comptable s'est doté de théories qui permettent d'avancer l'apparition des bénéfices dans le cycle d'investissement ; la deuxième est qu'il n'hésite plus, pour augmenter effectivement ses performances, à comptabiliser deux fois les mêmes bénéfices ; la troisième est que toutes ces transformations ou manipulations sont essentiellement destinées à distribuer plus rapidement et plus massivement des résultats aux managers et aux actionnaires » Conséquences. - Un changement radical et probablement totalitaire de perspective vers le "tout financier" étouffant des approches économiques et sociales fondées sur la création de richesses réelles, même si ces approches restent marchandes et soulèvent de nombreux problèmes de méthodes et de sens. - Un désengagement accru de la responsabilité sociale et territoriale des entreprises les plus importantes. Tout au plus, des codes de bonne conduite pourraient être discutés et acceptés dans le cadre de ce que l'on appelle la gouvernance. Il faut bien voir que ces codes de bonne conduite sont loin de répondre aux exigences de démocratie, de développement et qu'ils auront comme fonctions essentielles de travailler sur l'image de l'entreprise en question. - Un désengagement probable de la responsabilité environnementale des firmes avec, de ce point de vue, la mise en place de codes de bonne conduite dans le même esprit de ce qui vient d'être vu ci-dessus. - Une démission aggravés des institutions publiques et des pouvoirs politiques. Ceci est particulièrement préoccupant pour l'Union Européenne et les États-nations qui la composent. - Des difficultés permanentes et sans nom pour appréhender la situation réelle des firmes du point de vue des salariés et de collectivité. Leurs droits en matière de contrôle s'en trouveront objectivement amoindris jusqu'au point, si les rapports de force deviennent encore plus favorables au capital, de se trouver supprimés et remplacés par quelques recommandations à destination des actionnaires salariés. L'expérience des administrateurs salariés des grands groupes où les comptes consolidés s' inspirent déjà de l'IAS et varient sans cesse selon les stratégies (pour ne pas dire les humeurs) de leurs dirigeants est là pour nous alerter fortement sur les dérives mégalomaniaques suscitées par de telles normes (France-Télécom, Enron, Vivendi, Aol-Time Warner, privatisation d'Air France, d'EDF.). - L'instauration d'un système d'entreprises à deux vitesses, aux responsabilités et aux comptabilités distinctes ; celles relevant de l'IAS et celles restant, pour le moment, soumises au plan comptable habituel. - Une dérive accrue vers des normes privatisées pour la gestion des services publics. - Une pression constante pour généraliser les normes IAS à l'ensemble des acteurs économiques, PME, économie sociale, services publics etc.. Ainsi, à moyen ou long terme, la norme comptable généralisée risque de devenir celle-ci. Si cela était, ce basculement irait probablement de pair avec des reculs culturels, idéologiques, productifs, syndicaux, sociaux et politiques importants. Il n'y a donc pas qu'un phénomène de technique comptable qui est en jeu mais un affrontement politique, social et culturel réel. A terme : disparition de la comptabilité publique et des comptes sociaux. - A court terme, la mise en place de la norme génère de fortes contradictions et des conflits d'intérêts entre divers Etats et divers groupes. Sont contre en France la plupart des juristes, la plupart des banquiers et des assureurs, certains managers traditionnels (économie réelle). Ne sont pas hostiles la plupart des dirigeants des multinationales et les grandes firmes d'audit. L'IAS va aussi engendrer des difficultés et une activité analogue ou plus importante que celles issues du passage à l'Euro. Pierre Bachman, décembre 2004. [1] IASB : technostructure implantée à Londres dont les membres sont nommés par un conseil d'administration situé aux Etats-Unis, dans l'Etat du Delaware. [2] « International Financial Reporting Standard » créé par l'IASB. [3] après avoir scientifiquement démontré que le goodwill devait être systématiquement amorti, l'IASB a décidé de remettre en chantier son traitement de la question dès que les autorités américaines ont changé d'avis sur la question. [4] En bourse. [5] Cf. journal La Tribune du 4 février 2003 page 18. [6] Planification du profit sur une hypothèse de vie du groupe de 20 ans grâce à des modélisations mathématiques, cache sexe de la pseudo sciences économiques. [7] Banques, compagnies d'assurances, fonds spéculatifs, fonds de pensions. Les « Zinzins » pour les intimes ! ------ SUPPLEMENT : AU NOM DE L'EUROPE JE VOTE NON 2.- LES NEERLANDAIS PERDENT CONFIANCE DANS L'EUROPE Par Anthony Brownie, texte paru dans « Times » Maastricht, 11 mars 2005 Le cynisme a pris racine chez l'un des membres fondateurs de l'Europe À l'extérieur des bars de la place du marché, les drapeaux européens flottent dans le vent glacial, les magasins font de bonnes affaires en euros et le monument de métal des étoiles de l'Euro s'étire vers le ciel au-dessus de l'inscription : « Nous devons avancer au-delà des états nation. » Maastricht, la petite ville néerlandaise proche des frontières de la Belgique et de l'Allemagne où fut signé le traité qui donna naissance à l' euro, arbore fièrement son identité européenne. Mais, tandis que les symboles demeurent en place, une drôle de chose est en train de se produire chez les gens qui résident ici : ils commencent à donner l'impression de devenir eurosceptiques. « C'est un peu trop bureaucratique, trop gros. L'UE est trop éloignée de sa population, » indique une femme aux cheveux poivre et sel qui se hâte sur le pavé des rues piétonnes, bordées par les traditionnelles maisons néerlandaises à pignon. « C'est toujours de plus en plus gros. » L'un des six membres fondateurs de l'Union européenne, les Pays-Bas, qui occupent actuellement la présidence de l'UE, ont toujours été fiers d'être un partenaire européen fiable, loin devant tout autre pays, sauf le Luxembourg, pour ce qui concerne le soutien de sa population à l'UE. La nation s'enorgueillit d'avoir été le pays d'accueil du traité de Maastricht qui a vu aboutir le dernier grand projet européen : la monnaie unique. Mais, à l'heure actuelle, par un retournement extraordinaire, il se pourrait que les Pays-Bas fassent capoter le prochain grand projet : la constitution européenne. Le Gouvernement a annoncé qu'un référendum à ce sujet se tiendra le 1er juin. Ce sera la première fois que l'ont demande aux citoyens néerlandais ce qu'ils pensent de l'UE. Alors que l'attention internationale s'est concentrée sur la consultation des Français qui aura lieu seulement trois jours auparavant, le 29 mai, les Néerlandais paraissent beaucoup plus susceptibles de mettre le holà à la marche de rouleau compresseur de la constitution. En France, les sondages montrent encore une majorité en faveur du traité, mais le Gouvernement de La Haye a été consterné d'apprendre qu'une majorité de ses citoyens y sont opposés, et dans une proportion qui n'est pas mince. Un récent sondage est révélateur. Il montre que 42 pour cent des Néerlandais choisiraient de voter « non », contre 28 pour cent qui auraient l'intention de voter « oui ». Les Pays-Bas sont le seul membre fondateur de l'UE où les sondages d'opinion suggèrent que la constitution sera rejetée. Sur la place principale de Maastricht, au dehors d'un café, une troupe d' acteurs profitent de la pause de la matinée pour exprimer leurs griefs envers l'Union. Oda Selbos, une rousse à la chevelure flottante, déclare : « L'euro est un vrai problème. Tous les prix ont doublé. Quand nous allions en Espagne, il était avantageux d'avoir une monnaie différente. Je veux qu' on me rende mes florins. » Frederick Brom dit qu'il était opposé à ce que l'UE harmonise tout. « Dans l 'UE tous les articles deviennent similaires. Quand je vais en France, je veux manger du fromage français fabriqué par un fermier dans ses caves ; mais, en raison des normes d'hygiène, tout se ressemble. » Les Néerlandais exposent aussi des doléances qui leur sont spécifiques sur le financement de l'UE parce que, par tête d'habitant, ils contribuent davantage que tout autre pays. Le Gouvernement est en colère car, alors qu' on a imposé des contrôles stricts de la dette publique afin de pouvoir adhérer au Pacte de stabilité et de croissance sur lequel est fondé l'euro, la France et l'Allemagne ont enfreint ces règles ; apparemment dans l' impunité. Les votants se soucient également de l'impact économique de l'euro. Xavier Schilling, un agent d'assurance, raconte : « D'abord, beaucoup de gens aux Pays-Bas pensaient que la constitution serait une bonne chose. Maintenant, ils sont préoccupés du fait que l'économie ne va pas si bien que ça. » Il règne une opposition très répandue à la décision de la Commission européenne de laisser entrer la Turquie dans l'UE, qui donnerait à 70 millions de Musulmans le droit de vivre et de travailler en Europe occidentale. Ces craintes sont exprimées par le politicien non-conformiste Geert Wilders que son opposition à l'islamisme radical, à la Turquie et à la constitution a propulsé dans les sondages devant le Gouvernement. Dans une intervention récente à Rotterdam, M. Wilders a déclaré : « Les élites politiques veulent faire entrer dans l'Union la Turquie, un territoire islamique de millions de personnes, qui aura une énorme influence sur le super-État fédéral.. En raison de la nouvelle constitution européenne, la Turquie aura plus d'influence sur la législation néerlandaise que les Pays-Bas mêmes. Rien de plus insensé que cette situation. » Le Gouvernement espère que, lorsque les deux grands voisins des Pays-Bas - la France et l'Allemagne - auront, selon toute probabilité, ratifié la constitution juste avant leur propre référendum, les Néerlandais se sentiront trop isolés pour la rejeter. Il a donc lancé une vaste campagne publicitaire de télévision pour faire passer son message. Mais Maurice de Hond, sondeur le plus éminent des Pays-Bas, annonce que le référendum sur la constitution allait sans doute devenir un vote de protestation sur la direction européenne. « Les gens voteront sur tout, sauf sur la constitution, » a-t-il déclaré. « Ils voteront sur les questions de l 'euro, des dix nouveaux pays, de la Turquie, du Gouvernement. La Turquie présente un grand problème et un sujet beaucoup plus clair qu'une constitution qu'ils n'ont jamais lue. » En théorie, la constitution européenne doit être ratifiée par tous les états membres de l'UE dont neuf le font par référendum. À l'heure actuelle, les dirigeants européens se demandent ce qu'il adviendra si un pays vote « non ». Il est généralement entendu que, si la France dit « non », la constitution sera décidément morte ; et que, si la Grande-Bretagne dit « non », le Royaume-Uni devra renégocier ses relations avec l'UE. Mais que se passera-t-il si les Pays-Bas, l'un des plus importants partisans de l'Europe, disent « non » ? Un politicien néerlandais a affirmé : « Si la Grande-Bretagne rejette la constitution, la Grande-Bretagne aura un problème. Mais, si les Pays-Bas rejettent la constitution, alors c'est la constitution qui aura un problème. » UN ABOUTISSEMENT 1948 La Haye accueille une réunion pour la coordination internationale des Mouvements pour l'unification de l'Europe, présidée par Winston Churchill 1951 Les Pays-Bas deviennent membre de la Communauté européenne du charbon et de l'acier avec la Belgique, l'Allemagne de l'Ouest, la France, l'Italie et le Luxembourg 1957 Les Pays-Bas sont membre fondateur de la Communauté économique européenne 1985 Les Pays-Bas signent l'accord de Schengen abolissant le contrôle des frontières avec la France, la Belgique, le Luxembourg et l'Allemagne de l' Ouest 1992 Signature de l'accord de Maastricht créant une monnaie européenne unique 1997 Signature du traité d'Amsterdam renforçant les pouvoirs de l'UE en matière d 'ordre public et d'affaires étrangères 1999 Les Pays-Bas sont l'un des onze pays qui adoptent l'euro 2004 Ben Bot, ministre néerlandais des Affaires étrangères, attaque dans un discours les interférences excessives de l'UE dans les affaires nationales Février 2005 Le Gouvernement néerlandais annonce un référendum sur la constitution de l' UE Mars 2005 Un sondage d'opinion indique que près de la moitié des Néerlandais s'oppose à la constitution 1er juin 2005 Référendum néerlandais sur la constitution Timesonline.co.uk/article (Traduit de l'anglais) [ Les raisons d'un « non » aux Pays-Bas ne coïncident pas nécessairement avec celles d'un « non » en France. Au niveau de l'information, il semble néanmoins qu'il faille prendre très sérieusement ce mouvement politique inédit de la part d'un excellent élève de l' Europe. (NDT) ] -------- 3 - SANS PAILLETTES MAIS EN FANFARE, AVEC ATTAC, FAITES LE NON DONT L'EUROPE ET LE MONDE ONT BESOIN 30 avril à Paris Expo, Paris, Porte de Versailles ; Hall n°8 de 14 h à 20 h Des intervenants d'Attac de plusieurs pays européens, des militants altermondialistes de plusieurs continents viendront témoigner et dire l' Europe dont les peuples ont besoin. La restauration est assurée par la Confédération Paysanne et la coopérative Femmes Actives. Nous vous attendons nombreux et venant de toute la France pour cette rencontre internationale. Télécharger le bon de participation : http://www.france.attac.org/a4479 -------- Le Courriel d'information a été mis au point par l'équipe du Grain de sable. Reproduction autorisée sous couvert de la mention Courriel d'information ATTAC - http://attac.org/ --- Le Courriel d'information a été mis au point par l'équipe du Grain de sable. Reproduction autorisée sous couvert de la mention Courriel d'information ATTAC - http://attac.org/ Avertissement. Les documents publiés n engagent pas l'association ATTAC sauf mention contraire. Ils peuvent représenter l opinion de groupes thématiques,de personnes ou d autres organisations. Il s agit avant tout de pouvoir profiter des expertises et des idées disponibles afin de construire, ensemble, cet autre monde possible, de nous réapproprier notre avenir.