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Forum social en Allemagne (Erfurt, 21-24 juillet 2005). Située près de la ville de Weimar, la capitale du Land de Thuringe (2,5 millions d'habitants) a accueilli la première édition nationale d'un Forum social en Allemagne


L'Europe des citoyens se construit !

Le 03/08/2005
Grain de sable
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orum social en Allemagne (Erfurt, 21-24 juillet 2005)
Située près de la ville de Weimar, la capitale du Land de Thuringe (2,5 millions d'habitants) a accueilli la première édition nationale d'un Forum social en Allemagne.

Plus de 3 000 participants issus d'associations (dont Attac Allemagne), de syndicats, de mouvements pour la paix, de forums sociaux locaux, d'associations de l'économie solidaire, de mouvements issus de l'immigration, d'ONGs de solidarité et de revues ont participé à l'événement. Des représentants d'organisations et de mouvements sociaux européens et mondiaux (Belgique, Brésil, France, Grèce, Hongrie, Roumanie, Russie) se sont également joints aux travaux du Forum (voir également l'intervention de Jacques Nikonoff, disponible sur le site d'Attac France http://www.france.attac.org/a5285).

Séminaires, ateliers pratiques et rencontres stratégiques ont nourri ces quatre journées de débats intenses et productifs. Les questions sociales et celles liées au monde du travail ont alimenté l'essentiel des activités des séminaires même si l'ensemble des sujets qui traverse le mouvement altermondialiste en Allemagne (comme le thème de l'Europe) était à l'ordre du jour des discussions. Ce Forum social s'est ancré dans les préoccupations quotidiennes des allemands.

Il a parfaitement illustré les axes forts des problématiques historiquement traitées en Allemagne par les mouvements d'émancipation. En effet, les questions liées à l'écologie, à l'énergie, au nucléaire, aux rapports entre l'environnement et la transformation sociale, sont bien plus prégnantes et avancées dans la réflexion collective que dans les mouvements français. Ces clés d'analyse apparaissent comme essentielles dans les processus d'élaboration d'alternatives aux politiques néolibérales. Cela constitue un apport certain pour le mouvement altermondialiste en Europe.

Ce Forum a aussi marqué une évolution dans l'analyse. En effet, jusqu'ici, la critique du mouvement altermondialiste se concentrait sur les effets néfastes de la mondialisation néolibérale. C'est aujourd'hui le capitalisme en tant que tel qui est interrogé par beaucoup d'acteurs. Ce changement s'explique par le récent retour de la critique du « capitalisme » comme « sujet » politique. Les débats lancés par le président du parti social-démocrate d'Allemagne (SPD), Monsieur Müntefering, à l'intérieur de sa formation y ont largement contribué même s'ils ont été accompagnés d'une forte accélération de «réformes» libérales de la part du gouvernement Schröder !

Il a également constitué une nouvelle étape dans le développement d'un large mouvement de résistance aux politiques néolibérales en Allemagne. Il a été le vecteur d'un renforcement des relations entre les syndicats et les mouvements sociaux et citoyens. Trois des quatre centrales allemandes s'y sont activement associées : le syndicat unifié des services (ver.di), le premier syndicat industriel (IGmetall) et le syndicat des secteurs de la construction, de l'agriculture et de l'environnement (IG B.A.U). Il s'agit pour ces dernières d'un choix politique fort dans le cadre d'une stratégie visant à redéfinir les termes de leur alliance historique avec la sociale démocratie.

L'émergence de ces nouvelles convergences n'efface pas un certain nombre de problèmes persistants. Beaucoup de militants reprochent toujours aux directions syndicales le manque de soutien dont ils ont souffert lors du grand mouvement des «manifestations du lundi» en 2004. De leur côté, les syndicats ont réaffirmé leur profond scepticisme concernant une revendication largement partagée au sein du mouvement altermondialiste allemand (dont Attac) : le revenu minimum d'existence.

Cette première édition n'a pas non plus permis d'obtenir un saut qualitatif dans la construction de rapports plus étroits entre, d'un côté, les syndicats et les mouvements impliqués contre l'agenda 2010 du gouvernement Schröder, et de l'autre, ces mêmes syndicats et les ONG de solidarité, environnementalistes et sociales. Certaines d'entre elles, d'une sensibilité traditionnellement favorable à la coalition gouvernementale n'ont pas réellement participé à l'événement.

Une assemblée des mouvements sociaux s'est tenue après la clôture du Forum.

Réunissant 200 participants, elle a adopté une déclaration fixant des thèmes de campagne et un calendrier de mobilisation communs.

(Voir: http://www.sozialforum2005.de/fix/Sozialforum_in_Deutschland-Erklaerung_der_Versammlung_sozialer_Bewegungen.pdf)

Une rentrée politique qui fait débat..

Le principe de la charte de Porto Alegre (non participation des partis politiques) a été respecté. Pour autant, la question des prochaines élections législatives et celle de la création du nouveau parti de la gauche (Die Linkspartei) ont alimenté les discussions de beaucoup de participants en dehors des activités du Forum. Il est clair que le contexte politique et social qui a accompagné la tenue de l'événement est singulier. Après le succès populaire des « manifestations du lundi » et l'échec du gouvernement à répondre à la principale attente de la population, à savoir la lutte contre le chômage, la coalition Schröder est confrontée à une grave crise de légitimité. C'est pourquoi le chancelier a décidé d'anticiper la date initiale des élections générales au 18 septembre prochain suite à la sévère défaite rencontrée par son parti dans son bastion traditionnel de Rhénanie-du-Nord-Westphalie (NRW) le 22 mai lors des élections régionales.

Même au sein de ses propres troupes dans le SPD, une remise en cause de l'application de la feuille de route néolibérale s'amplifie.

Cette défaite hautement symbolique en NRW s'est avérée incarner l'expression d'un « Non » catégorique de la population aux politiques néolibérales qu'elle se voit infliger par la coalition gouvernementale. Le pays n'a pas eu de référendum sur le projet de Constitution européenne, mais l'épisode Rhénanie-du-Nord-Westphalie peut être considéré comme un référendum de fait concernant la même question qui a été posée en France le 29 mai : pour ou contre le néolibéralisme ?

La tendance pour le « Non » se confirme de jour en jour. La population, notamment dans les zones de l'ancienne Allemagne de l'Est qui sont les plus touchées par les ravages de cette médecine, exprime clairement son intention de sanctionner massivement le néolibéralisme en Allemagne.

Une alliance électorale vient d'être scellée entre le Parti du socialisme démocratique (PDS) - rebaptisé pour l'occasion « Le parti de la gauche » (chaque fédération peut décider d'utiliser le sigle « PDS » avec le nouveau nom) -etl'Alternative électorale pour le travail et la justice sociale (WASG), rassemblement créé en 2004 par des responsables syndicaux et du SPD en rupture avec les choix du gouvernement.

L'ancien président de SPD et Ministre des finances, Oskar Lafontaine, a désormais rejoint cette nouvelle force qui vient d'enregistrer 4 000 nouvelles adhésions le mois dernier. Ce phénomène illustre bien la crise de la représentation politique traditionnelle dont souffre le pays. De plus en plus de citoyens allemands considèrent les partis politiques comme une «vaste coalition pour le néolibéralisme» lorsque leur aspiration est de rejeter ce modèle.

L'alliance est créditée de 12 % des intentions de vote au niveau national et de 30 % dans l'est de l'Allemagne. Si les élections se tenaient aujourd'hui, elle deviendrait la troisième force du pays et la première à l'Est. Des dizaines de députés entreraient donc au Parlement allemand.

Cette situation sociale confirme le rôle qu'ont joué depuis quelques années les mouvements sociaux et citoyens, comme Attac Allemagne, dans la déconstruction de la norme libérale (« mobilisations du lundi », campagnes d'opinion).

Elle confirme également le poids de ces derniers dans le débat public même si les avis sont pluriels sur l'initiative électorale en cours. Certains s'en félicitent en louant sa crédibilité politique et ses premiers effets (forte réduction de l'extrême droite dans les intentions de vote notamment dans les couches populaires). D'autres sont plus critiques en invoquant la participation du PDS aux coalitions gouvernementale dans les Lands de Berlin et de Mecklenburg-Vorpommern où sont appliqués les recettes libérales. D'autres encore sont très critiques à l'égard du rôle joué par Oskar Lafontaine. Celui-ci a lancé une vive polémique, perceptible à Erfurt, suite aux positions qu'il a défendues à propos des travailleurs immigrés et au sujet de l'utilisation possible de certaines formes de « tortures » dans le cadre de « conditions spéciales ».

Préserver l'indépendance des mouvements sociaux et citoyens Quoiqu'il en soit, tous les acteurs d'Erfurt s'accordent sur la nécessité de préserver la neutralité et l'indépendance des mouvements par rapport à ce processus. Les logiques des mouvements sociaux et des partis politiques sont différentes et ne peuvent être confondues.

Attac Allemagne a d'ailleurs réaffirmé sa position. Elle ne soutient aucun parti ni aucun candidat. Tout membre de l'association souhaitant être candidat sur une liste électorale ne pourra se prévaloir de son appartenance à Attac. Il devra également se mettre en congé de responsabilités s'il exerce un mandat au sein de l'organisation.

La déclaration des mouvements sociaux réunis à Erfurt reflète ce même esprit. On peut y lire : « Quelque soit la composition du prochain gouvernement, il devra compter avec notre forte résistance s'il poursuit le développement de politiques de casse sociale ». Les participants de l'assemblée ont décidé d'organiser des mobilisations décentralisées avant les élections ainsi qu'une rencontre de bilan et de stratégie les 19 et 20 novembre.

Parmi les autres initiatives et dates mentionnées dans ce document figurent:

 o  le Conseil européen du 15 décembre à Bruxelles
 o  la tenue de la Coupe du monde de football pendant l'été 2006
 o  la tenue de la prochaine réunion du G8 en 2007 à Heiligendamm (Mecklenburg-Vorpommern)

Ces événements mobiliseront l'ensemble des forces du mouvement social et citoyen allemand.


Christophe Ventura, chargé des relations internationales au siège d'Attac France
Sven Giegold, porte-parole sur la fiscalité d'Attac Allemagne

 
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