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Réflexion sur la place et le rôle d'Attac dans le mouvement d'altermondialisation. Intervention de Jean Chesneaux, membre du Conseil scientifique d'Attac France, lors de la réunion mixte CA/CS le 25 septembre 2004


Attac dans le mouvement d'altermondialisation

Le 03/11/2004
Grain de sable
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e thème entre parfaitement dans les responsabilités du Conseil scientifique. Nous ne sommes pas des experts, détenteurs d'un savoir technique et scientifique et qu'on viendrait solliciter "à la demande", mais des citoyens engagés dont le travail intellectuel s'inspire des objectifs politiques d'ATTAC et espère enrichir ainsi la vie de notre association. Nous concevons notre activité intellectuelle comme un travail-avec, et non comme un travail-sur...


La question proposée appelle d'abord de réfléchir au mouvement en général, comme expérience politique et catégorie politique. Ce terme doit être analysé, doit être " contextualisé ". En effet, en France, nous sommes plutôt familiers avec des structures complexes, définies de façon précise sinon savante, et qui s'expriment dans des organigrammes de pouvoir, des jeux de scissions, d'alliances, de fusions, des " refondations " inventives.
Un mouvement est au contraire une "forme " politique plus fluide et plus multiforme, évolutive tout autant, mais qui n'a pas vraiment trouvé encore sa place dans notre culture politique française. Alors que la notion de structure floue est aujourd'hui prise en considération par la physique théorique...


On pourrait d'abord réfléchir au " mouvement " à partir d'expériences originales, telles que la New Left américaine ou le Movimento milanais, l'un et l'autre si actifs dans les années70. Ou encore avec le " Mouvement des femmes ", certes considéré comme ensemble multiforme d'aspirations communes et de pratiques collectives, visant à mettre en cause la position subordonnée des femmes dans la vie sociale - ce qui dépasse infiniment le "MLF-Déposé".


La New Left et le Movimento se définissaient d'abord par un socle de convictions communes, la dénonciation de l'hégémonie yankee dans un cas, le changement social radical dans l'autre. Ce socle commun laissant place à une grande diversité d'objectifs et d'initiatives. Ainsi à Milan les luttes des étudiants, les groupes de travailleurs radicaux dans les grosses boîtes, le soutien aux " Comités Russell " dénonçant la guerre des USA au Vietnam, le théâtre de Dario Fo (alors extrêmement populaire), les collectes de chansons ouvrières et paysannes (Nuovo Canzionere) ; sans oublier la presse quotidienne (Manifesto, Lotta continua) et le travail intellectuel des grandes revues et des maisons d'édition contestataires. Toutes ces initiatives se soutenaient dans des relations de co-appartenance, mais sans jamais tenter de se fédérer formellement, de se cristalliser dans un organigramme rigide.


La catégorie de "mouvement" se caractérise aussi par ses rythmes discontinus et son caractère évolutif ; des poussées soudaines alternant avec des phases d'attente et de repli. Elle s'est affirmée par des hauts-lieux symboliques et des " temps forts " : Montségur hier pour les Occitans, Seattle et Porto Alegre aujourd'hui pour le mouvement altermondialiste.

En revanche - ceci est manifeste dans les échecs d'il y a trente ans - ces mouvements n'avaient pas pu ou su construire un projet alternatif à la fois cohérent et convaincant. Et dans les deux exemples cités plus haut, le "système" américain traditionnel, le jeu des partis italiens traditionnels reprirent peu à peu le dessus, sans trop de difficultés. Cette défaillance majeure doit rester présente à nos esprits...


Notre réflexion générale sur le " mouvement " comme catégorie politique et expérience politique peut nous aider à analyser les relations entre ATTAC et le mouvement dit altermondialiste. Car ces deux termes ne sont pas de même nature. Dans un cas, une association fortement structurée, dans l'autre un ensemble souple, pluriel, intermittent. C'est sur la base de ces différences, que leur coopération doit s'organiser au service d'un objectif commun : la résistance à la mondialisation néo-libérale. Il ne s'agit ni de " fédérateur ", ni " d'allié ", car ces types de relations n'auraient de sens qu'entre des entités de même nature. Mais le mouvement altermondialiste, dans sa diversité si vivante encore que pas toujours bien coordonnée,peut nourrir la réflexion d'ATTAC et ses initiatives ; alors qu'ATTAC, en retour, peut s'affirmer comme une des composantes du mouvement altermondialiste, tout en gardant son originalité c'est-à-dire son mode d'inscription approprié et spécifique dans la vie politique française.

L'interrogation sur la place et le rôle d'ATTAC dans le mouvement altermondialiste est à la fois, et du même pas, un enjeu de responsabilité politique qui doit retenir l'attention de nos instances dirigeantes, et un thème qui appelle un travail de réflexion attentif, auquel des intellectuels peuvent utilement contribuer.

Intervention de Jean Chesneaux, membre du Conseil scientifique d'Attac France, lors de la réunion mixte CA/CS le 25 septembre 2004.

 
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