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(Jacques Weber) Réponse à Sven Giegold: la position d'Attac France est beaucoup moins monolithique que son article ne le laisse penser. On trouvera ci-dessous un résumé de mon intervention à une table ronde de l'université d'été 2004. Cette intervention s'appuie sur les travaux du groupe "énergie" d'Attac France.


Energie : quelles alternatives ?

Le 13/10/2004
Grain de sable
l


a question énergétique divise depuis plus de trente ans. Des grandes manifestations contre la construction de la centrale de Creys Malville au démantèlement des entreprises publiques (EDF, GDF, SNCF...), les opposants aux politiques en cours sont allés, divisés, de défaite en défaite:
- Défaite sur le plan démocratique; du plan Messmer (1969-1973) à la loi d'orientation de juin 2004, à aucun moment les grandes orientations de la politique énergétique française n'ont été l'objet d'un réel débat démocratique dans ce pays.
- Défaite des défenseurs de l'environnement qui tentent de promouvoir une logique de développement durable et le refus de toute solution irréversible léguée aux générations futures.
- Défaite sociale qui se manifeste par le retour en arrière de plusieurs décennies, rayant d'un trait de plume les services publics.

Avant de parler de solutions alternatives il convient de préciser la question.
Alternatives à quoi? Au pétrole? À un mode de développement? À une organisation sociale?


Un bien commun dans un monde fini et inégalitaire

Toute proposition sur l'énergie devra envisager simultanément quatre questions qui se posent au niveau mondial: l'épuisement des ressources, les inégalités d'accès, l'équilibre de notre environnement et la nécessité du développement. Toute politique qui négligerait l'une ou l'autre de ces questions relèverait de la supercherie et prêterait aisément à la critique.

L'épuisement des ressources
Le pétrole est condamné, dans 40 ans, peut être un peu plus, peut être un peu moins, qu'importe, c'est l'affaire d'une ou deux générations. À des détails de chiffres près il en est de même pour toutes les sources d'énergies non renouvelables, comme leur qualificatif l'indique, elles seront tôt ou tard épuisées.

Les inégalités d'accès
Le monde d'aujourd'hui utilise 10 milliards de tonnes équivalent pétrole (Tep). Cette utilisation est très inégalement répartie : 20% de la population mondiale dispose de 60% des ressources énergétiques; les 10% des pays les plus pauvres de la planète disposent de 2% des ressources énergétiques, de 1% de l'électricité. Les moyennes nationales ou continentales cachent évidemment des disparités énormes à l'intérieur de chaque zone géographique.

L'équilibre de notre environnement
Les neiges du Kilimandjaro ne sont qu'un souvenir et la plupart des glaciers des Alpes suisses auront disparu dans 50 ans: le réchauffement climatique n'est pas une hypothèse, c'est une certitude. L'origine humaine de ce réchauffement ne fait aucun doute: il suit la concentration, dans l'atmosphère terrestre, de gaz à effet de serre qui augmente inexorablement au rythme des activités humaines. La première source de ces gaz (70% des émissions) est liée à la combustion des énergies fossiles (charbon, pétrole et gaz). Les conséquences de ce réchauffement se profilent dans un proche avenir. Difficiles à prévoir, elles bouleverseront gravement les conditions de vie sur la planète, et affecteront en premier lieu les plus populations les plus vulnérables: celles des pays du Sud.
Le risque nucléaire est un risque étrange, très improbable d'après les calculs des statisticiens, ses conséquences seraient à l'échelle de l'improbabilité. Il est intéressant, si l'on peut dire, de noter qu'aucun assureur n'accepte de couvrir un tel risque. Les libéraux qui gouvernent le monde verraient d'un très bon oil les états conserver la charge de ce risque et céder au marché la rente, tant que le dit risque ne se manifeste pas (business is business, ben voyons). Les techniques actuelles de production d'électricité nucléaire utilisent la filière uranium plutonium, la transmission en héritage, pour une bonne centaine de générations futures, des déchets associés est difficilement assimilable à la définition du développement durable.

Énergie et développement
L'approvisionnement énergétique est un point de passage obligé de toute activité humaine. Le rêve d'une société humaine qui se passerait de l'énergie est une illusion, nous ne reviendrons pas à la carriole tirée par des chevaux, nous ne reviendrons pas à la bougie, nous n'enterrerons pas les ordinateurs dans un grand cimetière des péchés de l'homme.


"Comment répondre par l'accroissement de la production à une demande sans cesse croissante?" Des mauvaises réponses à une question mal posée

Les choix faits à un moment donné dans le domaine de l'énergie et des transports structurent toute l'activité économique d'un territoire pour des décennies, ce ne sont donc pas des choix neutres, et les retours en arrière sont difficiles à mettre en ouvre et longs à appliquer.
La méthode employée pour déterminer les politiques énergétiques des pays fait appel à des outils de prospective: des scénarios.

Les scénarios prospectifs: outils d'analyses ou prophéties autoréalisatrices?
Ces scénarios sont organisés de façon hiérarchique: des scénarios prévisionnels globaux qui prétendent être, comme leur nom l'indique, une exploration d'un futur probable, aux scénarios prospectifs qui sont des outils opérationnels, des aides à la décision.
En schématisant un peu, pour l'électricité: l'Agence Internationale de l'Énergie (AIE) fournit des chiffres de demande sur les décennies à venir, chiffres déduits des prévisions économiques et démographiques et des hypothèse sur les progrès futurs dans l'efficacité énergétique. Les experts nationaux de la Direction Générale de l'Énergie et des Matières Premières (DGEMP) et du Commissariat au Plan proposent aux pouvoirs politiques différents choix permettant de satisfaire cette demande prévue. La marge de décision des acteurs politiques est présentée comme extrêmement réduite, et donc fortement contrainte avant tout débat de société.
Ces choix peuvent avoir des conséquences à long terme sur la situation énergétique d'un pays : dans les années 1970 les scénarios français avaient surestimé d'un facteur deux la demande en électricité qu'il faudrait satisfaire en l'an 2000. Le choc pétrolier aidant, un programme ambitieux de construction de centrales électronucléaires a été impulsé par le gouvernement Messmer, d'où une surcapacité de production d'électricité qu'il a bien fallu écouler, entre autres par la promotion du "tout électrique" dans l'habitat et par les exportations. Le résultat paradoxal est que notre pays se retrouve avec un taux démesuré de chauffages électriques: 30% des logements, la moitié du parc européen, 10% de la consommation électrique totale et plus de 200 000 familles en difficulté de payement de leurs factures.

En juin 2004, la DGEMP a publié un "scénario énergétique tendanciel à 2030 pour la France", une sorte de scénario catastrophe agitant les spectres de la pénurie énergétique et du réchauffement climatique. Comme le lecteur a très peur, les dernières pages du rapport le rassurent: si, dans un ultime sursaut, on relance massivement l'équipement électronucléaire, la courbe d'émission de gaz à effet de serre s'infléchit un peu vers l'objectif vers lequel il faudrait tendre. Les auteurs prolongent alors hardiment cette courbe pour la faire rejoindre la courbe vertueuse qui divise par quatre les émissions tant redoutées à l'horizon 2050!
Il ne reste plus aux experts qu'à trouver le moyen de faire rouler les voitures et de faire voler les avions avec les centrales toutes neuves, la question des transports n'étant pas traitée.

Du développement fondé sur l'abondance énergétique à l'efficacité énergétique
D'autres scénarios sont possibles. Ils consistent à inverser la démarche, au lieu de partir d'une demande prise comme contrainte immuable, ils procèdent à l'analyse de cette demande:
 o  Nous n'avons généralement nul besoin d'une quantité d'énergie fixée à priori. Par exemple: dans une construction habitée, le besoin est celui d'une température jugée confortable; peu importe la consommation d'énergie qui permet d'atteindre cet objectif.
Le premier travail est dans l'identification des besoins qui relèvent des droits de tout être humain, dans une démarche collective car seul le débat démocratique permet de décider des besoins fondamentaux. A ce niveau essentiel de la décision, tout citoyen peut participer à la définition des besoins fondamentaux individuels et collectifs.
 o  La seconde étape consiste à identifier les méthodes qui permettent de satisfaire ces besoins fondamentaux, et le rôle du technicien est de délimiter les possibles. Dans le contexte de l'énergie quelques règles de bon sens sont accessibles à tous: il est inique de gaspiller une ressource rare, la sobriété et la recherche de la meilleure efficacité énergétique s'imposent donc; l'énergie se transporte mal, quelle que soit sa forme, tout ce qui peut se faire localement doit rester local; plusieurs besoins peuvent parfois être satisfaits par le même équipement énergétique, tous les immeubles nécessitent à la fois une source de chaleur et une source d'électricité, beaucoup de sources d'électricité fournissent en prime de la chaleur. c'est ce que l'on appelle la co-génération; etc. Le niveau plus global assure la pérennité de l'approvisionnement énergétique du niveau plus local. Utopie ? Non, il y a une multitude de lieux où ce genre de démarche commence à se mettre en place, de l'échelle de l'immeuble d'habitation à l'échelle de la cité. Individualisme méthodologique? Bien au contraire, c'est l'un des lieux où peut se développer de façon concrète la démocratie participative.
 o  À la dernière étape du processus de décision, le poids du technicien devient plus important, il doit déduire des besoins déterminés démocratiquement la planification des équipements de "production" de l'énergie nécessaire.

Ne nous faisons pas d'illusion, le schéma esquissé ci-dessus représente un choix de société, nous n'avons mis en balance le pétrole ni avec les éoliennes, ni avec le nucléaire (quoi que...). Nous inversons simplement la démarche, nous ne nous posons pas la question de savoir si tel ou tel choix sera plus ou moins générateur de profit. Nous remettons les techniciens à la place qu'ils n'auraient jamais dû quitter, indispensables mais subordonnés aux citoyens qu'ils sont eux-mêmes.


Agir maintenant.

Attendre que la technique évolue? Non.

Il y a urgence
Les glaciers fondent, cela a été dit, les conséquences pour les pays alpins sont incommensurables.
Les inondations menacent : le Bengladesh (133 millions d'habitants, 900 par kilomètre carré) risque de voir disparaître sous les eaux le dixième de son territoire au cours de ce siècle, etc.

Le mythe des révolutions technologiques à venir
La société de l'hydrogène.
Dans un grande intoxication médiatique introduite dans une confusion généralisée, tout y passe, la fusion contrôlée, l'hydrogène carburant qui remplacera l'essence dans nos voitures, les piles à combustibles, etc.
Remettons les choses en place, ces différentes techniques utilisent effectivement l'hydrogène, ou ses proches cousins, mais n'ont en commun que le nom de cet élément chimique.
Sans entrer dans les détails rappelons qu'il y a trente ans la fusion était annoncée pour dans cinquante ans, de même qu'aujourd'hui. De toute façon les centrales à fusion ne résoudront, au mieux en 2054, que les besoins de production extrêmement concentrés dans des équipements de forte puissance, dont il n'est pas sérieux de dire qu'ils seront accessibles aux 8 ou 10 milliards d'habitants escomptés de la planète.
L'hydrogène combustible n'a qu'un défaut, il n'existe pas à l'état naturel, il faut le produire à partir de l'eau, d'hydrocarbures ou de charbon, moyennant un apport d'énergie supérieur à celui qu'il transporte; le problème est déplacé, il n'est pas résolu.
Les piles à combustibles font partie de solutions techniques utilisables dans un avenir proche, dans certaines circonstances, c'est à discuter avec les techniciens le moment venu.
Agissons maintenant : L'un des argument des États-unis pour ne pas signer le protocole de Kyoto (les technologies en devenir) est pour le moins suspect.


Et ici.

Les meilleures solutions sont celles que l'on conseille aux voisins, ou "not in my backyard" (pas chez moi).

Du Nord au Sud : faites ce que je dis, ne faites pas ce que j'ai fait La peur du développement " sauvage " de la Chine, de l'Inde et plus généralement de tous les pays du sud a provoqué une sorte d'engouement suspect (BP-Solar, Total-Environnement .) pour le développement durable au sud.
Il est vrai qu'il y a problème: le Groupe d'experts Intergouvernemental sur l'Évolution du Climat (GIEC), qui s'occupe du changement climatique sous l'égide de l'ONU, estime que chaque habitant de la planète a légitimement le droit de rejeter 500 kilogrammes d'équivalent carbone (une mesure des gaz à effet de serre) dans l'atmosphère et que l'ensemble du monde devrait diviser ses émissions par 2. Le Sud a encore une petite marge (sauf la Chine qui a atteint la limite), l'Europe doit diviser ses émissions par 5, les États-unis par 12.
La première source de modération dans les émissions de gaz à effet de serre est dans le Nord, sauf à interdire au Sud tout développement.


Les éléments d'un puzzle complexe: une multitude de solutions techniques et sociétales en interaction

En fait tout a été dit précédemment concernant la démarche, il reste à résumer les pièces du puzzle et à donner quelques exemples de faisabilité.

À chaque usage sa source d'énergie
C'est la première règle; compte tenu des rendements de conversion, transformer de la chaleur en électricité pour produire de la chaleur, dans des convecteurs électriques en hiver, a pour première conséquence de réchauffer les fleuves avec deux fois plus d'énergie.
Transformer de la chaleur en électricité pour alimenter des climatiseurs qui "produisent du froid" est pire, on réchauffe l'atmosphère et les fleuves quand il fait déjà trop chaud.
Les solutions existent: non pas LA solution, mais une solution dans chaque cas particulier. Les sources de chaleur (et de froid) sont innombrables, le soleil, la combustion des déchets, la géothermie, l'eau, tout est affaire de situation locale, la ville de Kristianstad dans les forêts suédoises n'utilisera évidemment pas les mêmes techniques que Rome ou Marseille.
Réunir les besoins en chaleur et en électricité est une approche complémentaire de la précédente, les centrales de co-générations évoquées précédemment suivent cette logique.

La maîtrise de la demande
Dans le secteur de l'habitat et du tertiaire les économies potentielles sont énormes, et les techniques bien connues. Une habitation moyenne du nord de la Loire consomme typiquement une énergie de chauffage de l'ordre de 100 kWh par an et par mètre carré de surface. Les normes actuelles (RT2000 et bientôt RT2005) visent à diviser cette consommation par deux. Ces normes sont encore bien timides : les maisons bioclimatiques peuvent atteindre une consommation nulle ou même fournir de l'énergie par une combinaison de matériaux bien choisis, d'expositions bien conçues, de toitures solaires.
Les applications spécifiques de l'électricité (éclairage, informatique, appareils en tous genre) sont en progression rapide dans le secteur résidentiel et tertiaire. Un simple exemple : la suppression des veilles inutiles, cette manie qu'ont beaucoup d'appareils électroniques de ne jamais s'éteindre complètement, permettrait, en France, d'économiser une tranche électronucléaire.

Les énergies renouvelables
Au lieu d'utiliser des ressources que la nature a mis des millions d'années à élaborer, les énergies renouvelables s'inscrivent dans les cycles courts des saisons, avec les plantes comme combustibles, le vent et les eaux courantes comme sources de force mécanique, le soleil comme source directe de chaleur et d'électricité.

Ces techniques n'ont pas bénéficié des investissements massifs des autres filières : moins de 10% contre plus de 50% pour le nucléaire, d'après un rapport du Programme des Nations Unies pour le Développement. Elles sont en croissance rapide dans certains pays. L'Allemagne, par exemple, a mis en place un programme d'économies d'énergie et de développement des énergies renouvelables, tant dans la production d'électricité que dans la production de chaleur et la fabrication de bio-carburants : d'ici 2020 l'émission de gaz à effet de serre devrait être réduite de 40%, d'ici 2050 la part des énergies renouvelables serait de 50%, ce qui permettrait à l'Allemagne de sortir à la fois du nucléaire et du pétrole.

Remettre les transports à leur place
Qui oserait soutenir, en voyant le spectacle donné par les autoroutes périurbaines entre 7h30 et 9h et entre 17h30 et 20h, que "consommation croissante d'énergie" rime avec "bien être"?
Résoudre cette question, apparemment triviale, passe par la résolution d'autres questions qui le sont beaucoup moins : Pourquoi les gens habitent-ils aussi loin de leur lieu de travail ? Pourquoi les centres des villes se dépeuplent-ils? Pourquoi les campagnes se vident-elles? Pourquoi 800 tonnes d'oeufs voyagent-elles chaque année de France en Italie pendant que la même quantité d'oufs fait le trajet inverse? Pourquoi les boîtes de vitesse de nos voitures traversent-elles toute l'Europe pour rejoindre les usines de montage?
La remise en cause des transports concerne toute une organisation de la production, de l'urbanisme, des modes de vie.
La première urgence est de remettre en question la nécessité de la plupart de ces transports, de relocaliser l'économie, les activités quotidiennes, l'habitat, le travail ; partout où cette relocalisation est possible. De réserver les transports au domaine qu'ils n'auraient jamais du quitter: les échanges entre les peuples, le commerce de biens qui expriment les diversités culturelles.

Risque global diffus et gênes locales
Les dérèglements climatiques, la prolifération des déchets nucléaires, l'épuisement des ressources sont des risques globaux, diffus, qui ne sont pas immédiatement perceptibles dans notre environnement quotidien. Les mesures à prendre sont, elles, locales, directement perceptibles dans nos vies de tous les jours. Il y a des choix à faire, il est vrai que les éoliennes peuvent gâcher le paysage, faire du bruit. Remplacer des convecteurs électriques par une installation géothermique n'apporte pas plus de confort aux habitants d'un immeuble, remplacer des ampoules halogène par des ampoules faible consommation non plus.

Si les solutions alternatives sont imposées de façon autoritaire, elles soulèvent parfois des oppositions bien légitimes. Il en est de même pour les transports. La tentative de remplacer la voiture par les trams dans l'agglomération de Bruxelles s'est heurtée à l'opposition d'une partie de la population : une étude sociologique a montré que les habitants perçoivent la fin de leur journée de travail quand ils prennent le volant de leur voiture, perception qu'ils n'ont pas quand ils montent dans un tram bondé. Il faut donc que soit lancé un vrai débat permettant au citoyen de juger en connaissance de cause.
Une autre dérive, qui se manifeste même dans certaines associations, est la culpabilisation individuelle des consommateurs qui se voient tenus comme responsables personnellement de tous les maux de l'humanité. Les alternatives ne passent pas uniquement par des changements des comportements individuels, elles passent par une transformation profonde des rapports sociaux, des rapports de travail, de l'organisation de la cité.

Des alternatives au pétrole aux alternatives politiques : quels services publics?

Toute démarche alternative dans le domaine de l'énergie passe par une décentralisation de la chaîne de décisions et une coordination globale.
Cette articulation local global peut se faire de différentes façons. La solution libérale consiste à laisser les forces du marché trouver un hypothétique équilibre. C'est dans cette niche que vient se loger une sorte de néocapitalisme "vert", qui utilise la crainte justifiée des désordres à venir pour développer ce nouveau marché des énergies renouvelables.

Les rôles des collectivités locales et de la puissance publique Les ébauches de solutions que l'on voit poindre ici et là mettent en évidence l'importance du niveau local. Pour reprendre l'exemple déjà évoqué de la ville de Kristianstad, citons la plaquette descriptive de cette agglomération suédoise de 75000 habitants:

"En 1999, le Conseil Municipal de Kristianstad a décidé à l'unanimité de déclarer son intention de devenir une municipalité hors combustibles fossiles. La réduction des combustibles fossiles doit être réalisée dans un premier temps par l'utilisation de biocombustibles, la biomasse comme combustible pour produire la chaleur et l'électricité et le biogaz comme carburant pour les bus et autres véhicules. Des efforts sont menés dans le domaine de l'efficacité énergétique et le changement des comportements. La planification urbaine est un outil important pour promouvoir une municipalité hors combustibles fossiles.
La municipalité est en train de renouveler son programme énergétique afin de satisfaire sa déclaration de devenir une ville hors combustibles fossiles.[...]
La planification urbaine est un outil indispensable pour freiner l'augmentation du trafic et la municipalité de Kristianstad a introduit d'importants changements dans le centre ville pour encourager les cyclistes et les piétons.
La plupart du centre ville est zone piétonne. De 1998 à 2004, de gros investissements ( 1,7 million d'euros ) ont été réalisés et sont projetés pour l'extension du réseau de pistes cyclables. La campagne "De l'accélérateur à la bicyclette" a été lancée en 1999.
Le but de la campagne était de réduire les trajets courts en voiture en agissant sur les comportements. Les campagnes pour le vélo continuent dans toute la municipalité."

Kristianstad est une petite ville, qui bénéficie par certains côtés d'un environnement privilégié, c'est tout à fait exact. La difficulté est bien sûr plus importante dans les grandes agglomérations urbaines qui se sont développées sans aucun souci ni de l'environnement ni de la question sociale. Il faudra laisser le temps au temps.
Un réseau de villes commence à se constituer, lieu d'échange d'expériences, avec des succès et des échecs, 400 villes européennes, dont Darmstadt, Stockholm, Rennes, Bâles. Simplement pour souligner qu'il n'y a pas que les villages perdus dans les forêts de sapins qui sont concernés.
Mais le niveau local ne résoudra ni la question des transports internationaux, ni la nécessaire interconnexion des réseaux électriques, ni la péréquation tarifaire entre les régions et les secteurs d'activité.

Ni "baronnies" de spécialistes ni marché: une démocratie à (ré)inventer La politique énergétique a été monopolisée dans les années 1970 par des "baronnies" technocratiques. À partir des années 1980 une véritable trahison des élites s'est opérée, certains des anciens barons ont prétendu revêtir le marché libre et sans contrainte des habits de la démocratie, bradant dans la foulée les services publics issus du Programme National de la Résistance. La méthode est la même pour tous les (ex)services publics: vidés de l'intérieur, adoptant des comportements de prédateurs au niveau international et remplaçant les "usagers" par des "clients", ils ont été vidés de leur sens. Il ne reste qu'à les privatiser.
Les alternatives ne sont pas "d'abord techniques", les solutions techniques sont multiples; elles passent par le retour à la démocratie, par une démocratie à réinventer, du niveau local au niveau global.

Jacques Weber



Éléments bibliographiques
Groupe énergie d'Attac: La question énergétique en débat et Énergie: Réponses à des questions que l'on n'ose pas poser, Montreuil, 2004.
Hervé Le Treut, Jean Marc Jancovici, L'effet de serre : allons nous changer
le climat ?, Dominos Flamarion, 2001.
Énergie : Droit dans le mur, Alternatives Économiques, juin 2003.
Global Chance, Petit mémento énergétique, 2003 (http://www.agora21.org).
Collectif d'associations (dont Attac), Changements climatiques : équité et solidarité internationale, 2003.



Sites utiles:
http://www.vrai-debat.org,
http://www.negawatt.org,
http://www.debat-energie.gouv.fr,
http://www.manicore.com,
http://www.sortirdunucleaire.org,
http://www.drfc.cea.fr,
http://www.energiesosfutur.org,
http://www.iea.org,
http://www.ademe.fr,
http://www.cler.org,
http://www.energie-cites.org,
...et tous les liens que vous trouverez sur ces sites.

 
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