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(par Liem Hoang-Ngoc) Après le rapport Chadelat, le Haut Conseil pour la réforme de l'assurance maladie remet un rapport en apparence incolore, préalable à "la réforme" de la sécurité sociale. Le déficit de la sécurité sociale, de l'ordre de 10 milliards d'euros en 2003, est le prétexte d'une réforme qui pourrait bouleverser l'architecture du système de 1945. Sa philosophie sociale mérite en tout cas un débat national dont nous privera la procédure des ordonnances


L'assurance-maladie sur ordonnance

Le 05/05/2004
Grain de sable
a


près le rapport Chadelat, le Haut Conseil pour la réforme de l'assurance maladie remet un rapport en apparence incolore, préalable à "la réforme" de la sécurité sociale. Le déficit de la sécurité sociale, de l'ordre de 10 milliards d'euros en 2003, est le prétexte d'une réforme qui pourrait bouleverser l'architecture du système de 1945. Sa philosophie sociale mérite en tout cas un débat national dont nous privera la procédure des ordonnances.

Prétexte car il a suffi, au cours de la phase de reprise 1997-2000, d'une croissance supérieure à 2% pour que les comptes sociaux se soient avérés excédentaires, malgré les baisses de cotisations patronales... Pour ses promoteurs, comme pour les retraites, des causes structurelles viendraient s'ajouter aux facteurs conjoncturels pour justifier la réforme. Elles tiendraient d'une part dans l'évolution de la demande de dépenses médicales qui excèderait celle de la croissance de l'économie, de l'autre dans l'offre de soins incontrôlée des médecins. Or l'accroissement de la part des dépenses de santé dans le PIB n'est pas un problème dans une économie de services faisant une part belle au bien être social. La part des dépenses médicales représente en France 9,5% du PIB, alors qu'elle en pèse 14% aux Etats-Unis, où elle est en partie privatisée... C'est donc moins le poids des dépenses de santé qui pose problème à nos libéraux que le fait qu'elles soient, en France, socialisées...




ne socialisation plus importante et plus juste des dépenses de santé serait même possible. Tenant compte du caractère universel des dépenses de santé, une véritable réforme progressiste consisterait, en préservant la gestion paritaire des caisses d'assurance maladie, à achever la fiscalisation de leur financement afin de faire jouer à l'impôt progressif républicain tout son rôle, nécessaire pour promouvoir des soins selon la maxime : "à chacun selon ses besoins sanitaires". Les cotisations salariales seraient remplacées par une CSG rendue progressive par un abattement forfaitaire. Cette mesure permettrait de surcroît de substituer cet abattement à la prime pour l'emploi, dont la philosophie culpabilisante du chômeur est discutable. Les cotisations patronales pourraient être remplacées par une CSG entreprise, assise sur une assiette valeur ajoutée. Celle-ci mettrait à contribution les profits dont la part a gonflé au détriment des salaires sur lesquels pèse la majeure partie du financement des dépenses de santé.




es pistes ne sont pas celles qu'envisagent les projets d'une droite bien éloignée du gaullisme social. La CSG, décriée au nom de l'objectif de baisse des impôts, serait malgré tout augmentée dans sa version actuelle, injuste car non progressive. L'assiette valeur ajoutée rencontre l'opposition du Medef. Toute solution touchant la répartition des revenus (telle qu'une hausse des cotisations patronales) est proscrite. Outre la poursuite des déremboursements et du contrôle de l'offre, les propositions envisagées par le rapport Chadelat reposent sur le principe de la séparation des risques. La gestion des gros risques serait confiée à la sécurité sociale. La couverture des petits risques serait du ressort des complémentaires obligatoires: optique, soins dentaires, prothèses auditives...
Les ménages seraient donc mis à contribution par l'obligation de souscrire à ces complémentaires couvrant de façon privative ce que la sécurité sociale ne financerait plus. Ce projet se traduirait d'autre part par une augmentation des cotisations pour les mutuelles. C'est pourquoi certaines proposent un crédit d'impôt permettant de "solvabiliser la demande" des plus démunis, dans le cadre des politiques libérales de "discrimination positive" permettant aux pauvres d'accéder aux biens payants d'une société inégalitaire. Enfin, l'architecture de la réforme proposée par Chadelat n'interdit pas de faire bouger le curseur des risques couverts par les complémentaires, en incluant progressivement de moins petits risques...

La Fédération française des sociétés d'assurance pourra alors contester à la sécurité sociale et à la mutualité française le duopole de la gestion de l'assurance santé, au nom d'une concurrence, que des directives européennes ne manqueront pas de renforcer...

par Liem Hoang-Ngoc, Maître de conférences à l'Université de Paris 1, membre du Conseil scientifique d'Attac France
- article paru dans Politis n° 786

 
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